Whispering Sons – Several Others
Ce ne sont pas les Whispering Sons qui résoudront la problématique post-punk que nous avions évoquée dans la déjà lointaine chronique du dernier album de Dry Cleaning. Les codes du genre sont ici u(tili)sés sans la moindre vergogne, à commencer par la basse qui dès l’ouverture (pourtant intitulée “Dead End”) pose les jalons d’une musique sombre, martiale et oppressante, avant de poursuivre par une esthétique synthétique vaporeuse qui ne trompe personne.
Minimale, au début, la musique de Whispering Sons s’étoffe imperturbablement au cours d’un crescendo épique, qui augure des moiteurs extatiques dans les mosh-pits de France et de Belgique. La formule sera plus ou moins reproduite sur chacun des dix titres composant Several Others et si l’on peut le leur reprocher par principe, dans les faits, on se fera plus complaisant tant le résultat se révèle convaincant. Seule “Aftermath” et son piano sépulcral viendra dévier le cours de l’ensemble en une sombre parenthèse que l’on écoutera comme en apnée, suspendu aux notes égrenées et à la psalmodie nerveuse de la chanteuse Fenne Kuppens.
Cette dernière est pour beaucoup dans l’intérêt que suscite le groupe. Sa voix est d’une singularité tout à fait spéciale, pas seulement étrangement grave, mais avec également une épaisseur, une tessiture, proprement indéfinissable. Il y a en elle des polaroïds de celle de Nick Cave, quand le vent est à l’ouest et qu’il couvre de nuages noirs une partie du spectre. Celle-là même qui contenait l’essentiel de la parole et que Fenne Kuppens semble s’évertuer à vouloir retrouver, d’où une tension permanente qui s’insinue et ne nous lâche à aucun moment.
Il y a de la gravité vraie dans la musique des Whispering Sons qui les détache du peloton post-punk. Le verni est déjà par trop écaillé et nous n’avons pas à nous pencher plus en avant pour voir que ce qui se cache dessous est d’or, même s’il ne brille pas.
Several Others vibre et gronde d’une énergie que l’on pressent sincère et qui touche à des sentiments et à des peurs qui le sont tout autant. Il place les Whispering Sons au-dessus d’une mêlée trop mollassonne pour être stimulante, mais qui pourra toujours servir de point de comparaison à ceux qui auraient des doutes. Ce n’est pas notre cas, et nous tenons en eux, les meilleurs représentants d’un genre qui s’est tristement affadie ces dernières années et qui s’en trouve soudainement revivifié et recoloré de noir et de cendre.
Max