Protomartyr – Relatives In Descent

(Domino, 2017)
“She’s just trying to reach you, she’s just trying to reach you, she’s just trying to reach you…”
Les mots restent gravés, Protomartyr a encore fait très fort. Le ton grave de Joe Casey renforce l’impact de ses propos et certaines phrases nous reviennent en écho régulièrement (“Don’t wanna hear those vile trumpets anymore“).
Avec une entame aussi triste et fataliste que celle de “A Private Understanding”, le doute n’est pas permis. Protomartyr n’est pas devenu une bande de rigolos mais il sort toujours de grands morceaux.
Comme toujours avec le groupe de Detroit les morceaux sont solides, bien construits, entraînants, déroutants (tout ce que tu veux du moment que c’est positif) et se détachent à un moment par un instant de pure grâce. Comme si tout avait été construit pour aboutir à ce moment qui marque les esprits et nous submerge d’émotion. Comme ces ponts (ou refrains, on ne sait plus trop où on est) aux notes de guitare incroyablement mélancoliques et merveilleusement belles (“A Private Understanding”, “My Children”, “Half Sister”). Planqués subtilement au milieu du morceau, ce sont eux qui nous obsèdent et nous poussent inlassablement à la réécoute. Ils sont le sel dans vos chips, le sucre dans vos bonbecs. Même si vous savez que ce n’est pas très bon pour votre équilibre, vous en reprenez.
Mais réduire tous ces brillants morceaux à des gimmicks addictifs serait profondément injuste. Il y a fort à parier que vous craquerez également pour la basse rondelette de “Here Is The Thing”, les soubresauts de “My Children”, que vous suivrez avec passion ce combat incessant entre violence pure, rage difficilement contenue et libération/éclaircie/soulagement (“Caitriona”, “The Chuckler”, “Don’t Go To Anacita”). Que vous aurez envie de croire Casey quand il vous clame que “everything is fine“, alors que le chaos règne autour de lui (“Windsor Hum”).
Même quand il s’aventure sur le terrain miné de la new wave contemplative, avec un synthé qui vient déloger la guitare, Protomartyr le fait avec une classe folle (“Night Blooming Cereus”). Et sans coup férir, en prévention d’un éventuel endormissement sur nos lauriers “Male Plague” nous réinjecte une dose de punk rageur et libératoire.
Depuis 3 disques, surtout les deux prédécesseurs pour être tout à fait honnête, Protomartyr avait matraqué avec aplomb un message : il joue dans la cour des grands. Parmi la vague de groupes revival post punk qui sévit depuis quelques années, il y a désormais eux et le reste du monde. Le reste du monde (Traams, Frustration, Preoccupations, Institute, Ought, ….) n’est pas vilain, loin s’en faut. Mais eux ont un truc en plus. Un truc qui s’appelle la classe.