Ils – To End Is To Begin

Publié par le 27 août 2024 dans Chroniques, Notre sélection, Toutes les chroniques

(The Ghost Is Clear, 4 août 2024)

À un moment, faut s’y remettre. Assez glandé, la vie reprend ses droits. La vie et toutes ses saloperies d’obligations. Trimer, trimer, trimer, trimer, trimer, trimer, trimer, se reposer… Nous revoilà au début de la boucle. Finir c’est commencer, disent-Ils. Donc on recommence. À écrire aussi. Ce n’est pas la tâche la plus harassante et débilisante, loin s’en faut, mais dans ce domaine aussi – vous l’avez sans doute relevé – on ne foutait plus grand-chose. Fin de la trêve. Recommencer. Et pour cela, un disque qui fait perdre deux dents à chaque écoute se révèle assez opportun.

Ils* étaient déjà passés par là en 2020 quand le monde entier était sur pause et il fallait être assez bouché pour ne pas les remarquer. Ils sont revenus avec les mêmes armes. Imparables. La punition ne dure que 26 minutes mais elle est admirablement administrée. J’admets mériter l’admonestation avec cette succession de mots en adm, cela ne se reproduira plus. Nous disons donc ? Ils reviennent, Ils font mal. Le début cogne, vite et dru, mais la suite se situe encore quelques crans au-dessus. « Light ’em Up” est une pluie de bûches qui s’abattent sur notre crâne, lequel se fendille progressivement jusqu’à finir en miettes. Incisif, concis, explosif. La guitare cisèle tous azimuts, les cris animaliers du refrain sont appuyés par cette batterie infernale et le redémarrage qui suit, assimilable à un contrecoup accablant, est encore plus jouissif. Une boucherie. De quoi réévaluer à la baisse toute concurrence prétendument incendiaire. Dans la foulée, « Deceased and Insist » décime et persiste. Le riff est proprement dévastateur et, en s’égosillant, Tom Glose (de Black Elk, rappelons-le), semble s’enquérir de notre sort, ce qui nous plait bien (« Ça vaaaa ? » Mieux que jamais, mon con !). « Don’t Try Me » nous la joue montagnes russes en 2’11 avec démarrage en trombe, ralentissements fourbes, accélérations subites, et tout ce qui met à mal notre petit cœur meurtri. C’est un métier. To End and To Begin est avant toute chose une dérouillée qu’on se réjouit d’encaisser mais s’il nous obsède tant et nous lasse moins que Curse (le petit premier qui faisait déjà mal au fessier), c’est qu’il est également garni de variations subtiles et de petits recoins parfaitement sentis pour souffler un coup. C’est souvent bref mais c’est toujours bien amené et ça fait toute la différence (régalade basse-batterie incluse notamment au sein de « Fallen », « Hail Mary » ou « Let the Blood Pour Out »).

La puissance de frappe reste la même mais la précision du quatuor de Portland se révèle encore plus diabolique. On s’excite un peu moins sur la fin, peut-être parce qu’on a le souffle court et les articulations endolories (il semblerait bien puisque pris indépendamment, chacun des titres poutre comme il se doit). Au bout du compte, on éprouve tout de même l’envie pressante de vérifier, comme nous le suggère le titre, que la vie n’est qu’un éternel recommencement. On repart pour un tour ?

Jonathan Lopez

*Généralement, je préfère écrire au singulier après le nom d’un groupe et les alternances et confusions singulier/pluriel, souvent au sein d’une même phrase, ont le don de m’exaspérer. Cette fois, on va simplifier : puisqu’ils s’appellent Ils, ils seront toujours suivis du pluriel. Il a compris ?

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