Mark Lanegan & Duke Garwood – Black Pudding (Ipecac)
Le père Mark n’est jamais rassasié. À peine plus d’un an après la sortie de son fantastique Blues Funeral, voilà qu’il s’associe avec un nouveau collaborateur répondant au doux nom de Duke Garwood. Parfait inconnu pour beaucoup d’entre nous, le multi-instrumentiste n’est pourtant pas un bleu. Il a notamment enregistré avec Wire, The Gutter Twins ou Kurt Vile et ouvert bon nombre de concerts de Lanegan.
Sur ce disque sans prétention, sorti dans le plus grand anonymat ou presque, Lanegan et son acolyte reviennent aux bases. Une musique épurée sur laquelle le vieux sage vient nous conter ses récits au coin du feu. De sa voix rauque et rassurante, il nous emporte sans peine dans un beau voyage contemplatif.
Accompagné tantôt d’un piano (« Last Rung »), d’une gratte sèche voire d’un sax discret, selon les humeurs du Duke, il nous livre un album blues folk des plus reposants. Pour méditer. Faire le point sur sa vie. Les images défilent, les émotions affleurent et parfois la mélancolie guette (« War Memorial » ou le classieux « Pentacostal »).
Lanegan prouve une fois de plus qu’il est bien l’un des plus grands songwriters en activité. Il fait montre de son habituel talent pour venir nous caresser les esgourdes. Tout en délicatesse et simplicité. Pas besoin d’en faire des caisses. Ce qui n’empêche pas Garwood de se faire remarquer avec des accompagnements subtils et inspirés, parfaits pour sublimer la voix du crooner. Comme pour mieux l’exposer, Lanegan lui a d’ailleurs confié le soin d’ouvrir et clôturer l’album seul avec sa guitare.
Les morceaux sont sobres, sans fioritures mais fourmillent d’arrangements classieux et mélodies impeccables. Et mine de rien, on quitterait presque nos pantoufles quand une atmosphère inquiétante s’instaure (« Thank You » et ses cordes grinçantes) ou quand le bon groove de « Cold Molly » vient nous secouer gentiment.
Certains regrettent peut-être les périodes plus agitées de Lanegan, à ses débuts quand il envoyait du gras avec Screaming Trees ou par la suite au sein de The Gutter Twins ou Queens Of The Stone Age. Ils ont tort. Les deux ne sont pas incompatibles. L’artiste a déjà prouvé qu’il maîtrise plusieurs registres. Il reste intègre, continue de tracer sa route au gré de ses envies et d’enrichir sa discographie, avec des collaborations toujours fructueuses. Réjouissons-nous de pouvoir continuer à entendre sa voix unique.
JL