Low – HEY WHAT

Publié par le 6 septembre 2021 dans Chroniques, Notre sélection, Toutes les chroniques

(Sub Pop, 10 septembre 2021)

On est entre nous, soyons honnêtes. J’admire Low pour sa carrière, ce qu’il représente, sa remise en question perpétuelle. Mais je suis de ceux – finalement minoritaires – qui ont été déçus par Double Negative. On pouvait saluer l’audace d’un nouveau revirement et d’une musique qui refuse toujours autant de s’offrir au tout-venant. Oui mais. Mais ces saturations à outrance, ces effets douteux sur les voix ne venaient pas de nulle part non plus, puisant certaines inspirations dans quelques lubies mainstream, pas franchement du meilleur goût. Si le mariage avait fonctionné à merveille, je n’aurais rien trouvé à redire mais il était davantage question de frustration que d’émerveillement. Double Negative demeurait une œuvre d’une redoutable austérité face à laquelle je n’ai jamais cessé de buter. Vous l’avez sans doute constaté par vous-mêmes, HEY WHAT poursuit imperturbablement dans cette voie. Et là, vous vous dites “il va le flinguer”. Oui mais.

Mais cette fois, Low a laissé filtrer davantage de lumière au sein de cette masse difforme et impénétrable. Le chaos les entoure encore fréquemment au long de ces 46 minutes de musique mais les deux voix à l’unisson de Mimi Parker et Alan Sparhawk, parviennent à se frayer un chemin (“White Horses”). Et ces voix demeurent un phare dans les ténèbres (“All Night”, “More” où Mimi se résout à livrer un combat homérique, seule face au bruit). Les mélodies n’ont donc pas tout à fait perdu la partie et les gagnants dans ces cas-là, ce sont toujours nous. La production impressionne, surtout sur “Hey” ou “Days Like These”, morceaux scindés en deux voire trois, larguant les amarres comme si de rien n’était vers des horizons ambients soudain libérés de toute électricité, si pesante et assourdissante. Les décibels exacerbés, les saturations outrancières s’effaçant pour laisser place à des atmosphères totalement épurées et oniriques. Comme un envol de colombes après un bombardement incessant. Le sentiment est saisissant. “The Price You Pay (It Must Be Wearing Off)” fait également étalage d’une maitrise bluffante en conclusion d’un disque où les choses n’ont pas été faites à moitié mais dont on ne ressort pas pleinement satisfaits.

La musique de Low a toujours été affaire de contrastes, ils ont rarement été si prononcés. Cela ne rend pas forcément l’ensemble plus beau que jamais (assurément pas) mais il faut reconnaître que cette cohabitation presque impensable tient de la prouesse. De quoi abasourdir les jurés face à un tel déploiement technique ? Sans discussion possible. De quoi faire succomber les amoureux transis de leurs éternelles mélodies immaculées ? C’est beaucoup moins évident.

Jonathan Lopez

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