DISCO EXPRESS #13 : Low
À l’opposé de notre rubrique sobrement intitulée « discographies » qui se veut objective, exhaustive et documentée, nous avons choisi ici de vous résumer chaque mois des discographies avec concision, après une seule réécoute (quand ce n’est pas la première !) de chacun des disques. Des avis tranchés, des écrits spontanés, plus ou moins argumentés avec une bonne dose de mauvaise foi et d’amateurisme. Cause hey, this is just music!
I Could Live In Hope (1993) : anecdote inutile pour commencer : quand j’ai débuté la guitare et que je connaissais 2 accords (maintenant j’en connais 5), on a commencé à faire une compo avec ma copine qui se mettait à la basse (elle connaissait les deux cordes du haut)… Une fois, on est allés “jammer” avec deux potes qui savent jouer (les pauvres), on leur a fait ça et l’un d’eux a dit “c’est cool, on dirait du Low !“, on ne le savait pas (on n’avait jamais écouté) mais oui, la gratte était fort minimaliste et la ligne de basse était celle de “Words”. Cette putain de merveille qu’est “Words”. Too many words… Bref, ce disque est le plus lent et beau de la terre (« Lullaby », « Sea »… bordel c’est pas humain de tels morceaux), pur chef-d’œuvre probablement dans mon top 30 ever et je désespère qu’il soit un jour réédité. TAKE MY MONEY!
Long Division (1994) : on prend les mêmes, on n’accélère surtout pas et on s’enfonce dans un doux rêve peuplé de lutins trop sympas. De quoi comater sévère. C’est toujours très beau mais moins de morceaux se démarquent. Je retiens « Swingin’ », le chant hanté de Neil mêlé aux échos et la batterie plombée de Mimi (« Turn »), « Caroline » et ses répétitions interminables, cette boucle jamais bouclée… Pas le meilleur mais pas vilain, loin s’en faut.
The Curtain Hits The Cast (1996) : c’est toujours pareil, ça joue 3 notes par minute mais c’est toujours aussi délectable. Mimi est ultra touchante sur « Over The Ocean », le deux voix se chevauchent magnifiquement (« Mom Says »). La prod de Steve Fisk est impeccable, d’une grande pureté (son de gratte prodigieux sur les 9 minutes de « Laugh » qui fileraient des complexes à Neil Young) ou bien plus rêche et nerveux (« Stars Gone Out »). Ça sonne merveilleusement en vinyle, ils sont dans la pièce avec nous. Et l’incroyable « Do You Know How To Waltz » crépusculaire avec ses grésillements noisy parachève la démonstration en fin d’album.
Secret Name (1999) : je pensais mal connaitre ce disque, je pensais mal. « Two Step » est sublime, sur « Starship » on frôle le chant d’église (mormonne) mais on fredonne avec eux béatement. Géniale « Don’t Understand » avec les premiers bidouillages electro du groupe. Ok, il ne faut pas être dépressif ou sous redbull mais l’extase nous tend les bras.
Things We Lost In The Fire (2001) : Grandes envolées (« Dinosaur Act », « July »), merveilles de délicatesse (« Sunflower », « In Metal ») et morceaux sombres plombées (« Whitetail »). Un grand disque de plus. Comme indiqué plus haut, ce n’est (contrairement à mes précédentes rétrospectives) pas un groupe que j’écoute depuis mon enfance et ça se ressent pour certains albums comme celui-ci où je redécouvre certains morceaux… mais je constate avec bonheur que la régularité est là !
Trust (2002) : fantastique « Amazing Grace » pour commencer en apesanteur et on s’énerve un peu derrière avec « Canada » et ses grosses guitares véhémentes. Bigre, ils savent donc faire ça aussi ! Le sursaut électrique est de courte durée, retour à la beauté contemplative, à l’extase auditif (« In The Drugs », la déchirante « Point Of Disgust » sur quelques notes de piano). C’est un de leurs albums les plus cotés et il ne l’a pas volé.
A Lifetime of Temporary Relief (2002) : Trois CD de démos et raretés (+ un DVD). Et devinez quoi ? Rien à jeter. Formidables « Tired », « Tomorrow One », « Walk You Out » ou « Turning Over » et sa longue envolée à la six-cordes. Pas mal de reprises aussi (parmi mes petites chouchoutes « Fearless » du Floyd qui va comme un gant à Alan Sparhawk et « I Started A Joke » qui confirme que vous pourriez filer « le petit bonhomme en mousse » à Mimi Parker, elle en ferait un truc merveilleux. On rouvre les yeux, émerveillés après ce songe irréel et la confirmation que Mimi et Alan ne font jamais le déplacement vers la salle d’enregistrement pour rien.
The Great Destroyer (2005) : premier tournant. L’album commence par un monument du groupe (« Monkey ») dans un registre tout à fait nouveau. Low muscle son jeu, « Shut up and drive » dit Mimi à son mec qui ne bronche pas et voilà Low qui fait parler la poudre. Confirmation sur l’ensemble de ce disque incroyable. « Everybody’s Song », « On The Edge Of », « When I Go Deaf »… ça envoie de la bûche ! Quelle métamorphose !
Drums And Guns (2007) : premier coup de mou ? Je crois ne l’avoir jamais écouté auparavant donc ma vision est probablement biaisée mais j’avoue ne pas en avoir retenu grand-chose (« Always Fade » et ses bidouillages à la Radiohead et le disque finit fort avec l’excellente « Murderer » et la puissante « Violent Past » ou « Hatchet » dans laquelle Alan veut enterrer les monstres sacrés « Let’s the bury the Hatchet, the Beatles and the Stones » sur fond de cliquetis et d’une basse bien gourmande). Ah ben, c’est déjà pas mal, finalement.
C’mon (2011) : encore un qui ne s’était jamais frayé un chemin jusqu’à mes esgourdes et qui me les a bien chatouillées. Entre « Try To Sleep » façon petite comptine, la terrassante « Especially Me » habituée des setlists du groupe et la fort bien nommée « Majesty/Magic » (mamama Mimi !)… On se frotte les mains généreusement, avec ou sans gel hydroalcoolique. C’mon die old.
The Invisible Way (2013) : Il ne jouit pas d’une cote faramineuse, je le trouve pourtant très beau (comme l’artwork et comme… toujours). « You can always count on your friends to make you hiiiigh » dit ce gros foncedé d’Alan. Pas faux. Et sur vous aussi. Alors OK tout n’est pas inoubliable sur ce disque, ce n’est clairement pas le plus innovant mais il n’est pas dépourvu en moments de grâce (« Amethyst » ou l’euphorisante « Just Make It Stop »).
Ones And Sixes (2015) : entame fabuleuse avec « Gentle » qui amorce un virage : son de batterie étouffée, bidouillages synthétiques cradifiés puis l’époustouflante « No Comprende » qui grooverait presque avec sa section rythmique avant un final apocalyptique. « The Innocents » est géniale, « What Part Of Me » accrocheuse mais un peu trop gentille, cette satanée ligne de basse de « Kid In The Corner »… Et puis merde, encore un très grand disque !
Double Negative (2018) : je suis un peu embêté par ce disque, à cheval entre deux sentiments… Le parti pris de la prod est hyper audacieux (y’a des influences hip hop là-dedans !), le boulot réalisé est colossal, le rendu… me laisse un poil circonspect. Ce que j’adore chez Low, ce sont leurs mélodies 36 carats, le duo vocal sidérant de beauté et le fait que tout cela soit si étouffé, presque sacrifié sur l’autel de l’expérimentation est difficile à avaler. J’adore quand même « Dancing And Blood », « Dancing And Fire » ou « Fly » presque trip hop mais l’approche radicale (poussée à son paroxysme sur « Tempest » : vocoder + basse qui sature à mort = crise d’angoisse) me gâche le plaisir. J’aurai peut-être le déclic un jour…
Jonathan Lopez
Low en 20 morceaux (minimum un par disque) version Spotify et Youtube