Cloud Nothings – Final Summer
« Les albums se suivent et se ressemblent », chantait à peu près Joe Dassin. On pourrait tout à fait se demander si le Joe n’était pas fan de Cloud Nothings, parce que ses paroles pourraient tout à fait s’appliquer au groupe de Dylan Baldi.
Voilà comment j’avais prévu d’engager ma chronique de leur dernier album en date, Final Summer, avant de me rendre compte que c’est à peu de choses près comme ça que j’avais débuté celle du précédent, The Shadow I Remember. J’ai été un instant tenté de copier-coller le texte en me disant que peu de gens lisent mes articles, que notre rédacteur en chef a sans doute oublié l’article en question et que les play-offs NBA viennent de débuter.
Je me suis retrouvé un peu tiraillé, je l’avoue. Deux-trois clics et un article tout frais à envoyer, tout ça pour gagner du temps et m’épargner le casse-tête de trouver un angle intéressant pour parler de l’énième album d’un groupe qui les a plutôt bien enchainés depuis une quinzaine d’années. Un album que je trouve bon et que j’ai beaucoup apprécié, comme d’habitude, mais sur lequel je n’ai pas grand-chose à dire de plus que les précédents. Il y a peu de groupes dont les sorties continuent de m’enthousiasmer au fil des ans, assez pour que je les écoute avec intérêt, assez pour que je les recommande vivement, mais pas assez pour m’inspirer chaque fois de nouvelles formulations.
D’autant que Cloud Nothings semble être rentré dans cette catégorie de groupes qui ont trouvé la formule qui leur correspondent et qui l’appliquent sans trop en déroger. En ce qui les concerne : mélodies accrocheuses servies sur un lit de larsen et de de distorsion. Chaque morceau au tempo soutenu vient avec son supplément de rythmiques qui tabassent, mais le groupe n’hésite pas à calmer le jeu en ralentissant un peu de temps en temps. Dylan Baldi crie quand on lui en donne l’occasion, mais uniquement quand ça sert le morceau, ce qui lui évite de tomber dans les travers crispants d’un chanteur emo lambda ou d’un Dave Grohl. Bref, on est sur l’équilibre entre pop et gros son qui était déjà de mise lors du précédent, où les cris se font rares mais l’ensemble est bien plus bruyant que sur leurs albums de confinement. De fait, ça ferait bien envie de copier-coller mon précédent article ni vu ni connu.
Malheureusement, une forme d’éthique journalistique m’a empêché de tomber dans cette solution de facilité. Car si j’ai peu de culpabilité à l’idée de revendre à Jonathan un article qu’il a déjà publié, d’autant plus que j’écris bénévolement, force est de constater que Final Summer n’est pas un simple copié-collé de The Shadow I Remember. Je ne vais pas me contenter de dire que le premier morceau éponyme (ça, c’est pour emmerder les ayatollahs de la critique rock) débute par et contient du synthé, ce qui à ma connaissance est une première, car il ne s’agit que d’un accessoire. Le titre en question pourrait aussi bien se trouver sur l’album précédent sans se démarquer outre mesure.
En revanche, si Cloud Nothings semble avoir trouvé la bonne formule, il se permet de changer le menu suffisamment pour qu’on n’ait pas l’impression de remanger toujours la même chose. C’est tout bête, mais un départ en trombe suivi d’un morceau mid-tempo (« Daggers Of Light ») au lieu de l’inverse, mettre les morceaux les plus indie pop en deuxième partie de disque (« Running Through the Campus » et « Common Mistake »), tout ça démontre combien la tracklist joue sur la dynamique d’un album et lui donne sa personnalité. D’accord, on pourrait considérer que Cloud Nothings fait maintenant partie de ces artistes qui se contentent de sortir une collection de nouveaux titres et même si, oui, on n’a pas changé d’avis sur le fait que le groupe a définitivement embrassé son côté pop, on se dit que la fournée 2024 n’a pas tout à fait le même goût que la précédente. Comme les deux avaient plutôt bon goût, on a de quoi se réjouir.
Alors certes, on pourra dire que les albums de Cloud Nothings se suivent et se ressemblent, comme les articles que je leur consacre, mais ils ne sont pas tout à fait identiques non plus et assez satisfaisants pour qu’on ne leur reproche pas d’utiliser une recette qu’ils maitrisent avec talent. Régalons-nous plutôt jusqu’à la prochaine tournée !
Blackcondorguy