The Black Lips – Underneath The Rainbows (Vice)
Formé à l’aube de ce siècle, originaire d’Atlanta, les Black Lips viennent de livrer leur 7ème album (déjà) : Underneath The Rainbow. Photo de groupe dans un halo de lumière rouge sur la couverture, le leader Cole Alexander (chant, guitare solo) arbore sa gueule de petite frappe avec une chaîne dans la main, déjà prêt à en découdre. Il faut dire que les Black Lips en général mettent le feu partout où ils jouent. Leurs clips aux images violentes et provocatrices, mêlant la dope, le sexe, et la violence sans scrupule et tabous, donnent le ton. C’est un groupe de rock garage à l’imagerie et la brutalité punk, qu’ils ne font rien pour atténuer, bien au contraire.
Habitués du festival « South By Southwest », grand rassemblement du rock indé à Austin, au cours duquel ils délivrent des sets brûlants, Cole Alexander est passé maître dans la provoc, il finit régulièrement à poil, prend des poses obscènes et leurs concerts ne laissent jamais personne indifférent, cela peut osciller entre joyeux bordel et débordement de violences. A bon entendeur.
Successeur de l’excellent Arabia Mountain, sur lequel figurait notamment « Family Tree » (clip très osé encore une fois), cet album contient douze titre concis. N’attendez pas de leur part de longues envolées ponctuées de solos et divagations, pas leur style, l’ensemble de la galette excédant à peine 32 minutes. Les Black Lips ne font pas de la musique pour révolutionner le rock, ils s’inspirent au contraire de multiples références passées. En vrac, Kinks, Ramones ou Pistols pour l’énergie brutale et l’esprit rebelle, mais aussi, plus surprenant le déconneur Jacques Dutronc, dont ils ont repris « Hippie Hippie Hourrah ».
Un son résolument vintage sur l’ouverture, ce « Drive-B Buddy », de la même veine que « Save Me » sur le dernier disque d’Hanni El Khatib. Les titres courts et nerveux s’enchainent « Smiling », « Make You Mine », « Dorner Party » aux réminiscences Ramones, Rock N’ Roll jusqu’à la caricature, deux minutes chrono et aucune fioriture. Mélodies simples (sinon simplistes), qu’on retient après quelques écoutes et qu’on se surprend à siffloter comme ce « Justice For All » qui résonne comme un titre perdu de Stan Ridgway (ex-leader du groupe New Wave Wall Of Voodoo).
S’ils sont capables de balancer des titres qui invitent à se trémousser, Les Black Lips ne sont pas seulement un groupe à guitares pour faire danser les filles et certains morceaux semblent plus malsains. Dans ce registre, « Boys In The Woods » emporte sans effort la palme. S’il débute par des bruits d’insectes nocturnes, on comprend vite que la balade n’est pas bucolique. Basse et guitares poisseuses accompagnent la plainte d’Alexander « the boys are wild, back in the woods”. Sauvages les boys, et ce n’est pas le clip quasi censuré qui nous dit le contraire. Défonce, rednecks ultra violents et dégénérés, on se croirait dans Délivrance. Âmes sensibles et mineurs (bien entendu) s’abstenir.
Dans la même veine, les excellents « Do The Vibrate » avec hurlements de chiens à la lune et riff de guitare entêtant, et « Funny » aux guitares agressives et lancinantes : « I’m that boy who thinks it’s funny » clame Alexander sur le fait que le monde s’écroule.
En fermeture de l’album, « Dog Year » qui claque comme un des plus sauvages single des Kinks ou des Stones, met en évidence que si les Black Lips n’ont pas inventé un nouveau style (ou l’eau tiède), ils sont capables de torcher des chansons accrocheuses et bien foutues, et c’est déjà pas si mal.
El Padre