The Beths – Jump Rope Gazers

Publié par le 3 juillet 2020 dans Chroniques, Toutes les chroniques

(Carpark, 10 juillet 2020)

Chercher à découvrir de nouveaux groupes, c’est un peu comme rechercher une relation par internet. On peut aller sur des sites de rencontre énormes qui vont vous proposer régulièrement des artistes par petits bouts de morceaux noyés dans des playlists généralistes, ou par suggestions calquées sur l’algorithme de vos goûts. Ou alors, on peut se laisser guider par un entremetteur qui va vous présenter des groupes qui lui semblent susceptibles de vous plaire selon ce qu’il connait de vous. Réticent à spotify, deezer et compagnie, je suis plutôt dépendant des entremetteurs, dont le plus actif est sans nul doute le rédacteur en chef de ce webzine. Le problème, c’est que l’âge avançant, je deviens de plus en plus têtu, et les choux blancs qu’il a parfois pu faire me rendent plus hésitant à aller écouter les liens dans les mails qu’il m’envoie, à moins que la description proposée fasse totalement mouche.

Ce fut le cas avec The Beths. Déjà, un groupe dont le nom évoque le plus beau morceau craignos de Kiss* ne peut qu’attirer mon attention favorablement. Mais aussi, il semble qu’en vieillissant, les critères de mes goûts se sont drastiquement simplifiés : quand on me propose du rock indé teinté d’une esthétique années 90 avec des arrangements vocaux à plusieurs voix, des paroles « introspectives et ironiques » (dixit le communiqué de presse) et des mélodies bien troussées, j’écoute. Si on ajoute à ça une voix féminine, je craque. Et si en plus, les chansons sont accrocheuses, je suis conquis.

La technique d’accroche, parfois un peu insistante, a également son rôle à jouer. Là, on a essayé de m’appâter en me précisant que le groupe a déjà ouvert les hostilités pour les Breeders, Pixies, ou encore Weezer. Et pour le coup, j’avoue que ce genre de promotion assez lourde, où on essaie d’impressionner pour se montrer sous un jour plus séduisant, me laisse assez circonspect. Si tu es intéressant, peu importe ton CV, je t’écouterai pour toi-même et pas pour les groupes que j’aime que tu as déjà côtoyés.

Reste donc maintenant l’épreuve de la rencontre. L’autre sera-t-il aussi charmant que son image le laisse paraitre ? Sera-t-il à la hauteur de ses promesses ? N’aura-t-il pas des défauts rédhibitoires imprévisibles qui vous feront ranger le disque aussi vite que vous l’avez sorti ? Heureusement, The Beths se révèlent aussi agréables que leur profil le laissait entendre. Accroche immédiate avec le punky « I’m Not Getting Excited », à croire qu’ils savent exactement comment m’aborder. Et s’ils se calment assez vite, ils restent dans un registre de power pop sautillante tout aussi plaisant (« Acrid », « Don’t Go Away »), basculant parfois dans la pop onirique (« Out Of Sight ») ou la jolie ballade (« You Are A Beam Of Light »). Les arguments principaux de ces charmantes personnes, ce sont évidemment la voix maitrisée d’Elizabeth Stokes appuyée par celles de ses trois comparses, et la guitare qui sait quand se faire discrète et quand renforcer la dynamique de la chanson, avec des solos qui peuvent parfois évoquer de très bonnes choses. Autant de bons côtés qui font qu’il y aura immanquablement de nouveaux rendez-vous.

Comme pour un site de rencontre, on ne cherche pas toujours le grand amour, et on ne sait pas, d’ailleurs, sur quelle relation on va tomber. On peut avoir un coup d’un soir, quelque chose de plus régulier sans engagement ou même quelque chose de plus sérieux. Je ne sais pas encore où j’en suis avec The Beths, et il est encore trop tôt pour le dire, mais si vous avez des goûts qui se rapprochent de mes critères simplistes, alors je ne peux que vous encourager à écouter leur second album Jump Rope Gazers. Vous devriez passer un bon moment ensemble.

Blackcondorguy

*La ballade “Beth” sortie en 1976 sur l’album Destroyer, qui a offert au groupe son premier single dans le top 10 des charts.

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