Pixies – Doggerel

Publié par le 27 septembre 2022 dans Chroniques, Toutes les chroniques

(BMG, 30 septembre 2022)

Il semblerait que les Pixies, après avoir été le parangon du groupe culte aux albums considérés comme inégalables, soient désormais entrés dans la catégorie de ceux qui proposent régulièrement des sorties qui n’enthousiasment plus grand monde. Après les passions (positives comme négatives) autour de leurs deux premiers albums de reformation, les deux suivants ne paraissent pas avoir été particulièrement attendus, hormis par les fans les plus mordus. 

J’avais déjà chroniqué Beneath the Eyrie, disant en substance que la nouvelle formation des Pixies avait trouvé son rythme et proposait un « bon petit album » cohérent avec un son à lui et sans rien de mauvais dessus. Le problème, c’est que les morceaux, bien que corrects, ne me marquaient pas particulièrement et, pour être honnête, quelques années plus tard j’en ai oublié la plupart. Je ne peux donc pas dire que j’attendais ce nouvel album avec impatience, même si j’aime suffisamment la musique du groupe pour y porter de l’intérêt.

Dès la première écoute, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on continue sur la même lignée. Doggerel nous amène immédiatement en terrain familier et s’il n’est pas un copier-coller de son prédécesseur, l’ambiance évoque moins un western poisseux et le tout sonne moins comme une production des années 80, il a clairement un lien de parenté. La voix de Black Francis a toujours une identité forte, même si elle a mûri, et celle de Paz Lechantin semble avoir parfaitement trouvé sa place, dans un registre différent de celui de Kim Deal, mais qui s’accorde bien avec le chanteur. Vu que la basse est un instrument proéminent sur une bonne partie de l’album, on peut dire que la nouvelle bassiste est désormais complètement intégrée, même s’il n’y avait plus vraiment de quoi en douter. 

Deuxième chose qui frappe à l’écoute de cet album, c’est qu’une grosse moitié du disque met en avant les guitares acoustiques ou au minimum des guitares cleans. Les morceaux électriques eux-mêmes ne sont pas très énervés. On pourrait presque dire que c’est un album sage ou assagi, comme vous préférez, sur lequel on n’entendra jamais Franky crier. Comme il le fait généralement très bien, on pourrait être un peu déçu, mais il y a heureusement de quoi se consoler. Car n’oublions pas que la première qualité des Pixies, et de son chanteur-guitariste-auteur-compositeur-en-chef, c’est de savoir écrire de bonnes chansons. S’il décide de laisser sa rage de côté et de ne pas exploiter son versant punk, les mélodies sont bien là, qu’on soit sur les morceaux les plus pop (« Thunder And Lightning », « Vault Of Heaven »…) ou ceux qui sont un peu plus agités (le très bon single « There’s A Moon On ») ou dotés de ce brin de folie qu’on aime tant chez Frank Black (« Doggerel »).

On ne pourra nier, cependant, que certains morceaux rappelleront des aînés plus flamboyants. Certains pourront en faire le reproche. « Get Simulated » a des airs de « Is She Weird? » ou « Nomatterday » évoquera « Subbacultcha », pourtant j’ai personnellement du mal à leur en vouloir car, déjà, les morceaux originaux sont si bons que ça ne me dérange pas qu’on s’en inspire, et d’autre part, le second démontre que Frank Black n’a pas activé le mode flemmard côté songwriting lorsqu’il bifurque à mi-parcours de façon complètement inattendue. Ce morceau et « Dregs of the Wine » (le premier composé par Joey Santiago !) sont sans doute les plus intéressants du disque, car il s’agit à la fois de titres accessibles et accrocheurs, sur un format pop, mais qui savent encore surprendre même les fans aguerris et laissent donc voir que les lutins n’ont pas encore décidé d’enclencher le pilote automatique et de sortir des disques sans aucune inspiration.

J’avais conclu mon article sur le précédent album ainsi, je pourrais faire de même pour celui-ci, sans crier au chef-d’œuvre, les Pixies nouvelle formule ont de nouveau sorti un bon album, et c’est déjà chouette de pouvoir se contenter de ça. Heureusement, celui-ci se révèle encore plus accrocheur et offre des plaisirs que l’autre n’osait peut-être pas tenter. Ou peut-être que c’est simplement moi qui n’y étais pas réceptif. En tout cas, merci et bravo pour cette étonnante longévité.

Blackcondorguy

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