No Age – People Helping People

Publié par le 13 septembre 2022 dans Chroniques, Toutes les chroniques

(Drag City, 16 septembre 2022)

En un peu plus de quinze années de carrière, le batteur Dean Spunt et le guitariste Randy Randall ont hissé No Age au rang des groupes les plus insaisissables de sa génération. Toujours dans l’interligne, il trace sa voie en dépit du monde qui l’entoure et livre, avec People Helping People, un disque une nouvelle fois déroutant et personnel loin de tous canons.

Nous pourrions le classer dans le registre des groupes expérimentaux, ou arty, mais le label punk lui sied bien, aussi, et assez souvent. Nous pourrions, également, si l’envie de jouer les provocateurs se faisait sentir, souligner les nombreux éléments pop, voire power pop, qui ont jalonné son parcours depuis ses premiers EP. Pour autant, nous ne ferions qu’effleurer du doigt l’intangible que l’on ressent à chaque nouvel album du duo de Los Angeles, et qui est encore criant, ici.

People Helping People s’inscrit donc dans la fausse continuité qui caractérise la carrière de No Age. L’album ravira les initiés et ne signifiera toujours rien pour tous les autres. Le premier titre « You’re Cooked » insuffle d’entrée de jeu un air de kraut qui ne sera pas étranger au sentiment de tenir dans nos mains un disque de punk ambient, si la chose est possible en l’absence de Brian Eno dans les crédits. La sensation perdurera à l’arrivée du deuxième titre, « Compact Flashes», qui diffère légèrement par son minimalisme et par la présence du chant de Dean Spunt, mais qui nous maintient, malgré tout, dans des principes majoritairement instrumentaux, ou dans lesquels le chant ne tient qu’une place secondaire. Ça n’est pas, à proprement dit, une nouveauté pour No Age, mais nous avons le sentiment que l’accent a toutefois été mis plus pesamment qu’auparavant sur les ambiances sonores et sur la variété des tons et des textures. L’album fourmille de ressacs transpercés d’éléments mélodiques, surgis de nulle part, qui s’estompent à peine les avons-nous remarqués. Un titre tel que « Heavenly » en offre le parfait exemple et sera à considérer comme un des meilleurs titres de l’album. Ailleurs, et ici aussi, les couches de guitares de Randall se confondent et s’emmêlent avec les nombreuses trouvailles rythmiques de Spunt, dans ce même ballet sonore qui les unit depuis quinze ans et qui a ceci de surprenant qu’il nous apparait plus énigmatique que jamais.

En dépit de ce facteur potentiellement rebutant, People Helping People a quelque chose d’indéniablement lumineux et se singularise en ce sens, au regard du reste de la discographie du duo. Cependant, il est difficile de discerner la part de nonchalance désabusée, inhérente au groupe, et celle, plus apaisée et plus ouverte, sous-entendu par le titre de l’album et que l’on ressent surtout dans cet aspect lumineux, justement. No Age reste No Age et c’est donc un casse-tête pour mettre le doigt sur les raisons qui nous poussent à y revenir inlassablement malgré le sentiment de n’y rien comprendre, ou si peu.

L’album a beau être court, une fois terminé, nous avons la sensation de sortir d’un labyrinthe. Des écoutes nombreuses n’ont pas su l’atténuer, il faut avouer qu’on n’a pas franchement essayé de se battre contre elle. En conclusion, nous ne sommes pas davantage avancés sur le cas No Age, et c’est sûrement ce qui nous donne envie d’y revenir inlassablement.

Max

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