Neil Young with Crazy Horse – Psychedelic Pill (Reprise)
Si vous êtes déjà venus dans les parages, vous le savez, Neil Young ça nous parle et ça nous branche pas mal (chronique After The Gold Rush). Alors forcément, le retour du Loner avec son Crazy Horse, ce qui ne s’était pas produit depuis 1996 sur un album studio (à l’exception de l’album-concept Greendale), on avait hâte de voir ce que ça pouvait donner. D’autant que son dernier disque, Americana, sorti il y a seulement quelques mois était un album de reprises, pas vraiment transcendant, et ne pouvait donc combler pleinement notre appétit.
Neil n’a que faire des conventions. Ce n’est pas pour son 37e album qu’il va tomber dans la facilité. Bien au contraire, il choisit de faire péter les cloisons des standards rock. Au diable les formats radio de 4 mn intro/couplet/refrain, place à l’impro, aux solos de folie. Des morceaux interminables et un double album pour près de 85 minutes de musique.
“Driftin’ back” démarre comme une ballade dans le plus pur style youngien avant que ça parte en expérimentations rock où les guitares ont le champ libre pour s’aventurer où bon leur semble et nous emmener avec elles. Neil fête dignement le retour de son Cheval Fou qu’il chevauche avec bonheur, les choeurs sont également très présents et le secondent superbement. 27 minutes de pur bonheur.
Le titre éponyme ne marquera sans doute pas la discographie du père Neil, la faute à un effet Flanger un peu too much présent sur toute la chanson et qui finit par agacer quelque peu. Sur le CD2, une version plus classique du morceau est présente pour ceux qui en ont un peu marre de ce son tournoyant qui se veut psyché mais qui nous fait plutôt penser à des avions qui décollent.
“Ramada Inn”, premier single dévoilé de l’album, sonne comme du Neil Young classique mais il est si réussi qu’il a tout, du haut de ses 17 minutes, pour devenir… un de ses classiques. Le riff de base est hyper simple, comme souvent chez Neil mais parait comme une évidence. Les solos sont sublimes, le vieux Neil est toujours en grande forme. On savoure et on s’imagine écouter ça en bagnole dans le grand Ouest Américain ou dans son Canada natal. Le pied !
Il évoque d’ailleurs ses racines canadiennes sur le titre suivant “Born In Ontario”, morceau rock-country sympathique sans être inoubliable.
Le second disque confirme les bonnes impressions du premier. Et rehausse même le ton en ce qui concerne les morceaux “courts”, de bien meilleure facture. Que ce soit le très bon “Twisted Road” où il rend hommage à Bob Dylan, Roy Orbison et au Grateful dead ou “She’s Always Dancing” et sa superbe mélodie toutes guitares dehors. Ils auraient sans doute pu la pousser à plus d’un quart d’heure tranquille celle-là aussi mais ils ont dû se dire que ça aurait trop chargé la mule (ou le Horse en l’occurence). La belle ballade “For The Love Of Man” fait aussi honneur au talent de Sir Young.
Mais l’essentiel est encore une fois dans les virées au long cours de Neil et son Horse. En effet, “Walk Like A Giant”, morceau long de 17 minutes est tout aussi fabuleux que les autres titres “à rallonge” de l’album. Neil et sa bande sifflotent tranquille, sûrs de leur force et fiers du chemin parcouru. Il apparait tout de même nostalgique des années 60 regrettant de ne pas avoir réussi à changer le monde (“Me and some of my friends we were going to save the world. We were trying to make it better. We were ready to save the world. […] And it fell apart, and it breaks my heart to think about how close we came.”) Ça sonne comme en répèt’ et ça nous fait dire qu’on serait prêt à donner cher pour assister aux répèt’ de musiciens de ce calibre.
Le bon vieux Neil a encore de beaux jours devant lui et c’est une excellente nouvelle. Il nous offre un ticket pour un voyage vers un monde psychédélique sans avoir besoin de s’enfiler des cachetons. Ça fait du bien et c’est bon pour la santé. Merci M. Young !
JL