Les Lullies – Mauvaise foi
Les Lullies ne font jamais dans la fainéantise, le gang de Montpellier est très actif et ne cesse de monter en puissance et en notoriété bien au delà du cercle garage-punk. Les Lullies ont écumé de nombreux festivals, enregistrant plusieurs singles en un temps réduit (dernier en date : le 45 tours « Dernier soir »* sorti en février chez Head Records et Adrenalin Fix Music) et un premier album sans titre (2018) qui exhalait l’odeur de l’animal urbain et la crasse, tout en récoltant la quasi-totalité du legs du punk américain. Album de la consécration.
Jour de fête ! « Mauvaise foi », c’est un retour aux fondamentaux, textes en français, riffs efficaces et un sens mélodique affuté. Les paroles sont d’une sincérité qui fait usage d’inventaire, prenant le pouls du quotidien dans un flux étranger à toute préoccupation spirituelle ou métaphysique. « Pas de regrets » est taillé dans la chair, gravé dans les entrailles, constat d’une défaite mais sans amertume.
Les Lullies ne sont pas des faussaires en la matière, ils vivent à fond et ne font pas semblant, avec ce penchant nihiliste que l’on retrouve dans « Ce que je veux ». Plus surprenant est ce côté légèrement désabusé, dans le texte de « Soirée standard » qui squatte rapido le cerveau. Le titre me fait penser aux groupes Peripherique Est et Asphalte dont je suis un inconditionnel. Mauvaise foi s’inspire de référentiels a priori pas très éloignés les uns des autres, offrant un large spectre de sujets qui nous renvoient à notre propre laideur. Le fait d’écouter cette power pop aux multiples reliefs, consacre le disque comme un plaisir coupable. Epinglés de punkers, Les Lullies ne font pas du garage édulcoré, leur musique représente certainement le rejet des idéaux du monde actuel, en s’opposant au nombrilisme ambiant, leur répertoire renoue avec ce que le Rock a d’essentiel, dans son expression la plus simple, une description minutieuse des comportements (ennui, lassitude..) mais avec toujours cette envie d’en découdre. Véritable pare-feu contre le show-biz, Les Lullies évitent de se vautrer dans l’exubérance ou l’outrance, leur mission n’est pas simplement de remplir les salles de concerts, mais de faire découvrir leur musique, de partager cette énergie qui caractérise leurs prestations scéniques. Devant l’incapacité du milieu artistique à saisir l’émergence d’un renouveau musical, est-il utile de promouvoir uniquement les disques vendeurs que nous refourguent les mass media ?
Franck Irle
Pour accompagner la sortie de leur album, une release-party est prévue à Paris le 7 Juin au Point-Éphémère avec Alvilda et Beaten Brats.
*Titre que l’on retrouve aussi dans la compilation Nuits Blanches.
Franck irle