Parquet – Sparkles & Mud

Publié par le 5 novembre 2023 dans Chroniques, Toutes les chroniques

(Carton Records, 29 octobre 2023)

Si j’étais cynique, j’imputerais la bonne santé actuelle de la musique hexagonale à la politique catastrophique menée par le gouvernement depuis *insérez le nombre d’années qui vous arrange*, et au climat général proprement exécrable qui nous entoure. Dans ce contexte défavorable à l’optimisme, mais propice à la juste colère, débarquent les lyonnais de Parquet avec un premier album en forme de coup de boule salvateur balancé à la tronche du monde du dehors.

Sparkles & Mud est une mise en pratique brutale de la fameuse citation d’Emma Goldman : « Si je ne peux pas danser, je ne veux pas de votre révolution ». Pendant plus d’une heure, Parquet n’aura de cesse d’insuffler une rage contenue au travers de rythmes techno joués avec de « vrais » instruments et ainsi de préparer la dernière fête avant la fin du monde à l’ombre des nuages noirs qui s’amoncellent. Le constat est terrible, mais c’est toute la puissance de la musique de réussir à nous en faire relativiser la gravité. Par la répétition et le martèlement des thèmes et des rythmes, Parquet crée un engourdissement proche de l’ivresse et nous plonge dans un paradoxe épineux. D’une part les montées en puissances hystériques et les crescendo tapageurs provoquent un sentiment d’urgence et une envie d’en découdre quand d’autre part, la pulsation hypnotique qui nous pousse vers le dancefloor, nous rend docile et complaisant, prêts à nous soumettre en attendant le kick suivant.

Math-rock et post-punk transpercés d’arcs funk électriques, la musique de Parquet bouillonne de mille feux sombres et colorés. Les différents titres prennent le temps de bien faire monter la tension en étendant les thèmes et les boucles jusqu’à épuisement. Est-ce qu’ils auraient gagné en force de frappe s’ils avaient été plus concis ? Le doute est permis, certes, mais les dimensions grandioses de Sparkles & Mud lui donnent une aura menaçante et agressive qu’il aurait été dommage d’édulcorer sous couvert d’accessibilité. De plus, la groupe a laissé derrière lui un champ de mines dissimulées qui explosent écoutes après écoutes et nous préservent de l’ennui et d’un quelconque sentiment de confort qui aurait été particulièrement incongru dans un tel cadre. 

Dès son premier album, Parquet impressionne par sa conviction à proclamer haut et fort qu’il faut désormais compter avec lui et qu’on ne pourra pas détourner le regard. Déjà la rumeur gronde autour de nous. Il paraît que leurs concerts sont immanquables (dixit des gens qui ne les ont pas manqués… génies qu’ils sont). Il paraît même qu’ils vont les jouer façon Colonie de Vacance avec quatre scènes et le public au milieu… à voir. Nul doute, après ce premier disque, que la scène est la vraie raison d’être du groupe. On le pressent sans l’avoir expérimenté et c’est tout à son honneur d’avoir réussi à diffuser cette énergie via un enregistrement studio. Une réussite totale, donc, que l’on conseille autant aux amateurs de techno et d’électro qu’à ceux plus proches de la noise ou du math rock et qui confirme ce que j’ai dit en préambule au sujet de la bonne santé du rock hexagonal. 

Max

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