Zenzile Meets Jay Ree – 5+1

Publié par le 5 octobre 2018 dans Chroniques, Toutes les chroniques

(Yotanka, 5 octobre 2018)

Ressortons le dico page 137 si vous le voulez bien.
Dub : version reggae instrumentale se distinguant généralement par une session rythmique proéminente et l’utilisation fréquente de nombreux effets (delay, reverb notamment).

Si Zenzile a participé à l’apprentissage de cette définition pour nous, pauvres Français, ignorants des pionniers King Tubby, Lee Perry et compagnie, il nous a également vite rappelé que dub pouvait (devait ?) rimer avec expérimentation, recherche sonore et mélange des genres.

Ils ont donc pioché allègrement dans (liste non exhaustive) le punk, la new wave, le post rock, le kraut, la soul, le trip hop sans jamais craindre de se frotter au hip hop ou à l’électro. Ne jamais cloisonner son dub et il vous le rendra bien. Depuis plus de 20 ans donc, Zenzile nous en fout plein les oreilles sans jamais qu’on sache comment il va nous cuisiner.

Cette fois, pas de mystère : retour aux bases. Aux bases du son qu’il a développé initialement et même de sa discographie en donnant une suite à ses fameux 5+1. Pour 5 musiciens et 1 chanteur. L’heureux élu se nomme ici Jay Ree, qui avait déjà donné le change sur Electric Soul, il y a six ans de cela.

Quand à la tracklist, on perpétue l’histoire du dub avec les fameux 45 tours reggae, suivis de leur version instrumentale. En voici 5 de chaque. Et devinez quoi ? Ils sont tous bons. Ok, on devient prévisible mais en même temps on a du mal à être déçus par ces gens-là.

Comment être déçu par une telle entame déjà ? Une mélodie vocale implacable, une basse qui fait trembler les enceintes, le skank se met en route, le cerveau se connecte. Il ne s’en échappera plus. Difficile de ne pas faire le lien entre ce “4000 Years” et le mythique “400 Years” de la doublette Marley/Tosh, près de 50 ans plus tôt. Il ne lui fait certainement pas injure en tout cas.

Sur “Stay Close To Me” ce merveilleux saxo qui a le don de nous faire frissonner en live nous embarque d’entrée. Jay Ree signe encore une fois une prestation de haut vol. Et on vole avec lui, très haut pour atterrir en douceur sur une version dub aux petits oignons. Jay Ree sait également se la jouer gouailleur à la façon des grands DJ* à la U-Roy avant de faire parler la clarté de son timbre quand il est question d’enrober l’affaire au moment du refrain (ça s’appelle “So Good So Far” et c’est difficile à contredire).

En fin d’album, Zenzile s’échappe quelque peu des traditions le temps d’une “Disconnected” (et son jumeau “Dub Connected”) captivante et planante à souhait, reposant sur un beat électro minimal, avant un final où synthés et guitares blindées d’échos ne convoquent le Floyd de la grande époque.

On pouvait difficilement en douter mais Zenzile sait donc toujours faire du bon gros dub ancestral (et pas que, évidemment…). Ils sont même très peu à maitriser si bien la recette. Il y a là de quoi satisfaire tout le monde. 5+1 ravira les amateurs de dub roots, enchantera les amoureux (fidèles voire nostalgiques) de Zenzile et tous ceux pour qui la musique reste un des meilleurs moyens d’évasion.

Jonathan Lopez

*p 49 du dico : les DJ jamaïcains avaient pour coutume de déblatérer, presque à la façon des futurs rappeurs, pour accompagner les sessions instrumentales.

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