The Besnard Lakes are The Last of the Great Thunderstorm Warnings

Publié par le 17 février 2021 dans Chroniques, Toutes les chroniques

(Fat Cat, 29 janvier 2021)

Je n ’avais pas vu arriver ce nouvel album des canadiens de The Besnard Lakes. J’avais même carrément zappé leurs deux derniers essais. Sans doute pour éviter la probable (?) déception de succéder aux majestueux The Besnard Lakes are The Dark Horse (2007) et The Besnard Lakes are The Roaring Night (2010, celui-là je l’aime fort). Des albums que je réécoute très régulièrement comme des classiques, tant ce mélange de (post)-rock psyché et de shoegaze cotonneux continue à m’impressionner.

Alors, la cuvée 2021 ? Artwork, ok. C’est conforme au style impressionniste des Montréalais. Le nom de l’album ? À l’image du disque. Sans doute un poil (trop) long. 9 titres. On dépasse les 70 minutes. Et quand j’ai vu les 18 minutes du final « Last of the Great Thunderstorm Warnings », je me suis d’abord pris à rêver aux titres fleuves des compatriotes de GYBE! ou Thee Silver Mount Zion. Et à un feu d’artifice de clôture avec solis psyché en apesanteur. En fait, il est plutôt question de descente vers le fond sombre du lac. On ne va pas se mentir. La première écoute complète du disque s’est soldée par une (légère) déception la faute à ce tunnel final long comme une année sans concerts. Les 11 dernières minutes du disque sont en effet un drone venteux sans réel intérêt musical. Sauf que les faces de ce double LP se nomment « Near Death », « Death », « After Death », et « Life ». Et que le père du frontman Jace Lasek est mort en 2019. Seul le silence pouvait donc clôturer cet album semble-t-il. Mais ça fait retomber un peu trop le soufflé. D’autant que les canadiens jouaient sur du velours depuis le début, en déroulant leurs fondamentaux. Du rock brumeux aux mélodies lancinantes, avec des harmonies vocales toujours aussi addictives (on a du écouter les Beach Boys par ici). Moins centré sur la guitare et ses soli psyché, ce nouvel album offre plus de divagations ambient autour de claviers et synthés en tout genre (le début de « Blackstrap » très floydien). Le timbre parfois haut perché de Jace Lasek peut en irriter certains mais le groupe est maître dans l’art de trousser des refrains efficaces. La triplette imparable de singles est un concentré pur sirop d’érable du style des canadiens. « Feuds With Guns », le titre le plus court de l’album, est pourtant blindé de claviers que je fuis comme la peste en temps normal. Mais l’alchimie opère toujours au gré de petites trouvailles sonores, d’arrangements élégants et d’un petit solo discret de guitare. « Raindrops » avec ses envolées shoegaze, plane tranquillement là-haut en se foutant pas mal du plancher des vaches. Et quel meilleur titre que « Our Heads, Our Hearts on Fire Again » et son refrain monumental pour maintenir le plan de vol. Cavalcade céleste. Bien placé après le plus sombre « Christmas Can Wait », peu fourni en décorations, malgré un petit riff addictif sur le dernier quart des 8 minutes.

Death crawls through my window
And as the evening dances
An honest man falls from his iron frame
This is where lonely hearts live


Ambiance plus éthérée sur les 9 minutes en apesanteur de « The Dark Side of Paradise ». Le tempo est lent, les guitares psyché gavées de réverb sont de sortie. On n’est pas bien là ? À la fraîche, dans l’espace ? On redescendra quand on aura envie de redescendre. Et « New Revolution » nous ramène à la terre ferme d’une rythmique synthétique de batterie surprenante tant le tempo s’est accéléré d’un coup. Classique la révolution toutefois, ce titre plus centré sur les guitares nous ramenant plus près de l’album The Roaring Night (ce qui n’est pas pour me déplaire). C’est d’ailleurs la tendance de la fin de l’album avec l’excellent « The Father of Time Wakes Up » et sa guitar lead qui s’envole enfin pour le plus beau solo du disque. Dommage donc que l’on arrive à ce fatal « Last of the Great Thunderstorm Warnings » et son vide intersidéral final. D’autant plus dommage qu’en gardant uniquement les très bonnes 7 premières minutes, on se retrouve déjà avec un album de 60 minutes plus que convaincant.

Valeurs toujours sûres sur le marché indé, les groupes canadiens. Ce nouvel opus de The Besnard Lakes ne va sans doute pas révolutionner le cours de votre année 2021. On trouvera sûrement des albums plus ambitieux ou aventureux dans les mois à venir. Mais après presque 2 décennies de carrière, rajouter (encore) un bon disque à notre discothèque canadienne déjà bien fournie, ce n’est pas un mince exploit.

Sonicdragao

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