Entropy – Dharmakāya

Publié par le 11 septembre 2024 dans Chroniques, Notre sélection, Toutes les chroniques

(Crazysane, 30 août 2024)

Les zélateurs auto-proclamés du nouveau monde se sont lamentablement vautrés, en traçant avec un humour morbide sur la peau de chaque individu la ligne pointillée censée séparer chaque individu de son environnement social, en annonçant la liquidation définitive du passé, le rock, ce vieux crevard refait surface de manière cyclique sous la forme multiple de styles musicaux. Les faits sont établis, au post-punk a succédé un revival 90’s, réactivant même des groupes de l’ère Mésozoïque. Ce qu’il faudrait pour court-circuiter cette répétition de l’histoire, c’est un interrupteur et le tour est joué mais ça tourne toujours, ça reste dans la tronche.

Entropy a choisi un melting pot d’influences indéterminées, en nous gratifiant d’un titre volontairement cynique «Americans Will Save You (In the End)» décoché avec le flegme digne d’un slacker sous California Gold. ll y a toujours mieux et tout le monde le sait, mais là où le quatuor allemand nous surprend, c’est par cette tonalité dissonante vocale et musicale.

Une tapisserie bruitiste, puissante sur laquelle Hans Frese vient insérer quelques messages romantiques. Peu enclin à une passivité correcte, il y a une conscience qui interroge l’âme, « Pyrotheology » est le chainon censé combler le manque métaphysique de la nature humaine, à grands renforts de riffs qui égratignent la membrane des oreilles jusqu’au fade out.
« Well Sad » est le single type qui remplit sa mission, refrain simpliste, mélodies mémorisables, vous y êtes ? C’est un flashback en plein dans les nineties, skate, bières et poste radio qui crache ses décibels. Entropy n’est certainement pas une référence à ce raccourci quelque peu réducteur, le quatuor élargit les harmoniques, histoire que tout soit fluide, riffs trempés dans l’huile, de ceux que Foo Fighters avait initié le temps d’un album avant de s’effondrer dans une power pop saupoudrée de hard FM. Scandale, les fans vont crier à l’esclandre !

Scaphandre nécessaire pour vous plonger entièrement dans onze titres qui ne manquent pas d’air, quelques influences de Velvet Crush, The Lemonheads. Nulle trace de krautrock, on serait tentés de dire hélas, mais « Dharmakāya » résiste à la paille de fer et à l’eau bouillante, laissant émerger une fanfare glaciale, la cadence ne faiblit pas.

Mais au fait, qu’est-ce que l’entropie ? En thermodynamique, il s’agit d’une déperdition de l’énergie, mais dans le cas présent, il s’agit d’un écart de température non négligeable entre Pleroma (le monde céleste) et Kenoma (concept de vide), deux opposés qui se complètent dans la trinité du corpus Bouddhique.

Franck Irle

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