Ellah A. Thaun – The Seminal Record of Ellah A. Thaun

Posted by on 16 mai 2025 in Chroniques, Incontournables, Notre sélection, Toutes les chroniques

(Howlin’ Banana, 16 mai 2025)

The Seminal Record of Ellah A. Thaun… tout est dans le titre. Avec ce nouvel album, le quintet rouennais frappe un énorme coup et démontre une fois encore qu’il est nettement au-dessus de la mêlée au niveau de l’écriture, de la composition, et plus globalement de la proposition artistique au sens large. L’envie est grande de déverser une avalanche de superlatifs élogieux sensés définir ce disque d’une richesse folle, dernier né d’un groupe protéiforme et génial, dont la discographie se scinde entre les aventures en solo de la chanteuse, Nathanaëlle-Eléonore Hauguel, et les disques en commun avec tous les autres membres (une trentaine de disques au total). Celui-ci est à ranger dans la seconde catégorie et s’inscrit dans la continuité collective d’ouvrages épiques et noise tels que Arcane Majeur (2018) et Arcane Majeur Deux (2022).

Difficile de savoir par quelle face l’aborder tant il convoque des influences disparates, tout en demeurant parfaitement homogène. Sa manière de souffler le chaud et le froid rebat les cartes à chaque écoute et donne le sentiment élusif que quelque chose nous échappe malgré notre attention. A ce titre, le post-punk selon Ellah A. Thaun possède une énergie paradoxale, presque réconfortante, alors que les élans pop et les digressions acoustiques ont quelque chose de putride, qui suinte entre les lignes, et qui rend l’expérience limite anxiogène (« The Dollhouse »). On n’est pas étonné d’apprendre que l’enregistrement de The Seminal s’est fait dans la douleur, et que le groupe l’a achevé exsangue, au bord de l’asphyxie.

Entre rage et introspection, l’ouverture du disque nous fait naturellement penser à tous ces groupes des années 90 – Sunny Day Real Estate et Smashing Pumpkins en tête – qui oscillaient entre les deux pôles, et auxquels Ellah A. Thaun rend brillamment hommage, tout en évitant d’en délivrer une pâle copie. On a le sentiment, au contraire, que le groupe est allé puiser directement à la source du phénomène. L’hommage n’atténue aucunement la sincérité de sa démarche et la connivence évidente avec celle de leurs aînés.

Il ne faut surtout pas croire pour autant qu’Ellah A. Thaun est uniquement tourné vers un passé qu’il n’a pas connu. Même s’il est vrai que l’on pense aussi à Coil sur le magnifique (le sublime !) « Tératome », au mitan du disque, le titre « UFO’s (Sky Alphabet) », par exemple, a une ligne de chant qui nous évoque Palm, notre groupe préféré des dix dernières années. Rien que pour cela, on remercie Ellah A. Thaun de le faire revivre un temps, lui qui a splitté beaucoup trop rapidement. Le reste de l’album est un dédale dans lequel on aime se perdre. Qu’on lève la tête ou qu’on la baisse, on tombe toujours sur des éléments surprenants qu’on n’avait pas remarqués et qui nous poussent à systématiquement relancer le disque une fois celui-ci terminé. The Seminal Record of Ellah A. Thaun… fait partie de ces œuvres qui seront redécouvertes inlassablement par une meute de nouveaux adeptes qui auront l’impression d’avoir trouvé quelque chose de rare… et ils auront raison. 

Toutes les références et influences qui la composent en partie, mettent surtout en évidence la profonde singularité du groupe et soulignent son pouvoir d’attraction. En se rappelant à d’autres groupes qui peuplent notre imaginaire, il prend naturellement place à leur côté et s’impose fermement comme leur égal, et non comme un duplicata coupable. Ainsi, on n’aime pas Ellah A. Thaun, on l’adore. On le porte en nous comme à dix-sept ans quand on pensait que la musique pouvait changer la vie. 

Max

1 Comment

  1. Mais la musique change la vie mon ami !

    Benoit

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