Interview – Kim Deal

C’était donc vrai. Kim Deal est extrêmement cool et ne fait rien pour le paraître. Elle l’est. Pourtant, de son propre aveu, quinze heures, c’est habituellement l’heure de sa sieste. Mais depuis son domicile dans l’Ohio, par écrans interposés, elle s’est révélée pleine d’énergie, spontanée, drôle, d’un naturel déconcertant, prête à s’emparer de sa guitare pour se livrer à une petite démonstration. Un plaisir à interviewer. Et dire que cet entretien n’a failli jamais se produire… Des mois qu’il était prévu et sans cesse repoussé. Un peu comme ce premier album solo, Nobody Loves You More, que d’aucuns n’espéraient plus et qui se révèle aussi varié que réjouissant. Il n’y a pas à dire, cette femme-là, que ce soit avec les Pixies, les Breeders ou sous son propre nom, ne nous offre que du bonheur.
Cet album est prêt depuis plusieurs mois. J’ai la chance de pouvoir l’écouter depuis le mois de juin. Pourquoi la sortie a-t-elle été autant décalée ? Une obscure raison de promo ?
Kim Deal : Je n’en sais rien ! C’est le label. Peut-être avaient-ils d’autres sorties à ce moment-là. Beggars doit savoir. Ou 4AD.
Toi, non alors. Ils ne t’ont donc pas demandé ton avis ?
Tu sais, je ne suis pas pressée de toute façon… Je connais des musiciens qui, à la seconde où ils finissent leur album, veulent qu’il sorte ! Ça les tue d’attendre. Même s’ils savent pertinemment que ce n’est pas le bon moment. Ils vont l’enregistrer en une journée, le mixer le jour suivant… Et je m’interroge : « Vous ne voulez même pas l’emporter chez vous et l’écouter pendant une semaine entière, par exemple ? » Moi, ça me va. Je travaille toujours sur autre chose. Je ne m’arrête pas pour attendre.
Au-delà de la frustration de ne pas pouvoir en parler autour de moi, je trouve un peu dommage que ce disque dont certains morceaux ont une ambiance très estivale, comme « Summerland » et « Coast », sorte en plein automne…
Il fait hyper sombre en plus aujourd’hui ! Le climat a changé, il pleut et il fait froid. Peut-être que cet album va réconforter les gens. Ils pourront s’asseoir près du feu et rêver à l’été en écoutant « Summerland ». (Rires)
Tu avais déjà sorti « Are You Mine » et « Wish I Was » il y a plus de dix ans, dès 2011, dans le cadre d’une série de singles sur vinyles, dans des versions bien plus lo-fi. Et « Walking With A Killer » est devenu un morceau des Breeders. Pourquoi ne pas avoir sorti d’album à ce moment-là alors que tu avais déjà dix morceaux ? Tu ne trouvais pas l’ensemble assez solide ?
(Elle hésite) Voici comment ça a commencé : j’ai composé un morceau que j’aimais bien. J’avais un Tascam seize pistes d’une bande d’un demi-pouce et un 388 huit pistes d’un quart de pouce. Ça ressemble à un gros quatre pistes, grand public. La série de singles a été enregistrée sur ces machines dans un grenier. Certains comme « Beautiful Moon » ont toutefois été enregistrés dans un vrai studio. Mais la version de « Are You Mine » de l’époque a été enregistré sur un huit pistes (Elle fait le signe trois machinalement avec ses mains). Je ne sais pas pourquoi je te montre trois doigts… Un HUIT pistes ! (Rires) Sur une bande d’un quart de pouce, c’est-à-dire une simple cassette. Et j’ai perdu la piste sept, celle de la guitare… L’enregistrement s’est arrêté. Mais tu pouvais l’entendre sur la sixième piste, comme une piste fantôme. Comme je te le disais, il s’agissait de matériel d’enregistrement grand public. Reste que j’ai trouvé le résultat cool, j’aimais la façon dont ça sonnait, mais pour un 45 tours, pas pour un album. Pour te dire, j’ai fini par enregistrer Nobody Loves You More dans un vrai studio en 2016 ou 2017. C’est à ce moment-là que je me suis dit que je ne voulais pas que cette chanson n’existe que sur un 45 tours, dans cette version. Pour moi, il s’agit d’un bon morceau qui méritait plus qu’une dirty session durant laquelle je déconnais toute seule. Mais ne va pas croire que je ne me suis pas fait la réflexion avant : cinq 45 tours plus tard, je m’étais dit : « Ça fait dix chansons, j’aurais pu sortir un album ! » Mais c’est finalement la piste disparue de « Are You Mine » qui a été l’élément déclencheur, la raison pour laquelle j’ai voulu le réenregistrer.
En 2011-2012, tu n’imaginais pas que ces chansons pourraient connaître une seconde vie ?
Les morceaux connaissent toujours plusieurs vies… Par exemple « Wish I Was » : les textes étaient déjà écrits à l’époque mais je l’ai sorti en version purement instrumentale car j’avais essayé plusieurs fois de chanter dessus et à ce moment-là je trouvais que ça ne fonctionnait pas ! Je ne sais pas, le résultat me semblait artificiel. Mais finalement, je suis revenu à l’enregistrement d’origine sur lequel je jouais de la batterie et chantais en même temps et où Mando (NdR : Lopez, bassiste des Breeders de 2000 à 2006 et de 2008 à 2012) se chargeait des lignes de basse, et c’est cette version qui figure sur l’album. Au moment où j’avais finalement opté pour la version instrumentale, je trouvais que le chant sonnait mal. Je savais que je réessaierais de la faire sonner comme elle sonnait dans ma tête : groovy, détendue, triste et joyeuse à la fois. Un son cool à la Velvet Underground en mineur-majeur à la guitare Les Paul. Et avec un tambourin.
Tu l’avais visiblement parfaitement en tête ! (Rires)
Oui, oui. Exactement !
Comment t’est venue l’idée de travailler avec l’orchestre Mucca Puzza ? N’était-ce pas un peu intimidant ?
Même chose que ce dont on vient de parler. Je l’avais vraiment en tête ! Steve Albini m’a offert un ukulele parce que j’avais joué à son mariage. Je l’ai laissé de côté pendant des années et un jour je l’ai ressorti et mis dans ma voiture. Parfois, sortir d’autres instruments pour jouer te donne des idées. Et à l’arrière, on trouvait des indications d’accords pour jouer du ukulele. Je ne sais pas en jouer. Si tu me demandes de jouer un ré au ukulele, j’en suis incapable, ou alors il faudrait que je cherche une minute pour trouver. Peu importe, j’ai donc inventé ce morceau sans connaître les accords car je ne joue pas de ukulele, je joue de la guitare ! (Rires) Avec le ukulele, j’invente les accords. Et tu n’as peut-être jamais remarqué mais si tu mets un capo sur la 5e frette d’une guitare normale, tu obtiens le son d’un ukulele (Elle chante « My Dog Has Fleas », chanson visiblement habituelle pour accorder son ukulele). Il n’y a pas d’octave mais peu importe. Un, deux, trois, quatre, cinq (Elle se met à jouer « Summerland »… et ça sonne vraiment comme un ukulele !).
Wow !
Donc dans ma tête, pendant que je joue (Elle continue à jouer), ça fait (Elle chante, imite même l’arrivée des cuivres)…
Ah oui, je vois !
Oui, je l’entends dans ma tête ! Donc à ce moment-là, je me suis demandé si je pouvais la faire jouer par un orchestre sans savoir placer les accords, sans connaître la partition, la portée, ni quoi que ce soit d’ailleurs ! (Rires)
Ça a plutôt très bien fonctionné !
Oui !
« Je ne me dis jamais que j’aurais aimé être une superstar. Dans ces cas-là, tu es obligé de faire (Elle crie) : “AUSTIIIN ! PARIS ! COMMENT ÇA VA, PARIS ?” »

« Crystal Breath » est un morceau très fun, electro et dansant. Tu étais une clubbeuse ?
On m’avait demandé de composer une chanson pour une série TV. Je sais que c’est ringard, je ne devrais même pas en parler, mais je pense que c’est intéressant. En fait, ils n’ont pas aimé le morceau et ont refusé de l’utiliser ! (Rires) Le fait qu’il ne l’aiment pas m’a confortée dans l’idée qu’il s’agissait d’un bon morceau ! Dans cette série, l’actrice Rose Byrne joue le rôle d’une fille qui veut devenir la meilleure monitrice d’aérobic de Los Angeles, en 1981 (NdR : Physical, diffusé en 2021 sur Apple TV+). Je me suis donc renseignée pour savoir quel genre de musique était utilisé lors de ces cours. Et il se trouve que tous les morceaux étaient composés avec cet horrible petit clavier (NdR : Elle fait un bruit ridicule). C’était du disco, mais avec un son tout fluet.
Toute la musique que tu adores !
Exactement ! (Rires) Du disco avec un son vraiment merdique (Elle imite le son « titititi »…) J’ai donc enregistré un son sur mon quatre pistes, que j’ai ensuite ralenti. Puis je l’ai passé dans un amplificateur et j’ai ajouté un peu de distorsion, un coup de Marshall, et le son est subitement devenu putain de massif ! Et c’est comme ça que ça a commencé. Je n’ai utilisé aucun effet bizarre, ce n’est que moi en train de jouer.
Comment Steve a-t-il réagi en entendant ce morceau ? À première vue, j’imagine que ce n’était pas trop sa tasse de thé…
(Elle éclate de rire) Probablement pas ! Mais Big Black utilisait une boîte à rythmes, alors s’il m’avait fait chier, je lui aurais renvoyé ça dans la face ! (Rires) Je me demande pourquoi je n’ai jamais pensé à lui demander quel réglage il avait utilisé. Mais ça, c’est Steve ! À l’époque, j’utilisais une boîte à rythmes Oberheim DMX, un instrument que je trouvais super ringard. Puis trois ou quatre ans plus tard, j’ai entendu Big Black utiliser cette même boîte à rythmes, et ils en sortaient un son tellement cool ! Ils l’ont accélérée pour qu’elle sonne de façon improbable et qu’aucun batteur ne puisse jamais jouer ces rythmiques. Ils s’affranchissaient vraiment des règles. Et ça rendait hyper bien…
Tu as enregistré beaucoup d’albums avec lui. Que t’a-t-il appris de plus important ?
(Elle réfléchit) C’est difficile à dire… Là où il avait raison, c’est que si je me lâche et que je m’y mets vraiment, quoi que j’enregistre, ça sonne. Si j’essayais d’enregistrer une ligne de chant et qu’à la première difficulté, je décidais de changer un mot parce que je le chantais faux, il me faisait (Elle fait non de la tête). Bon, parfois, ça sonnait tellement faux qu’on ne pouvait vraiment pas conserver la prise, mais la plupart du temps il avait raison. Dès que je commençais à changer un mot, ça ne sonnait plus de la même façon, plus aussi bien. Si ça sonnait un peu mieux faux, c’est parce que ça faisait sens dans l’intensité du moment. Et il avait raison. Et c’est souvent ce qui s’est passé. Lorsqu’un groupe effectuait un bon enregistrement puis disait : « Ça sonnait bien, mais recommençons ! » Il ironisait : « Oui, on a cinq bonnes prises sur bande, mais faisons-en six autres ! » Il avait raison là encore. La première était probablement la bonne et si ce n’était pas le cas, elle avait sans doute quelque chose que la onzième n’avait pas. C’est difficile à déceler… mais il avait raison la plupart du temps. (D’un air vaincu) T’as raison, Steve…
Désolé, j’ai une autre question un peu triste. J’ai lu que « Are You Mine » était inspiré par une phrase que t’avait dite ta mère. Tu l’as perdu il y a quelques années. Enregistrer ce morceau a-t-il été douloureux ?
La première fois que je l’ai enregistré, c’est lorsque la piste a disparu. En 2012, ou quelque chose comme ça. Ma mère souffrait d’… Connais-tu quelqu’un atteint d’Alzheimer ?
Non.
C’est très bizarre… J’ai vécu avec elle, j’ai pris soin d’elle. Elle en a souffert durant 18 ans. (Elle insiste de façon théâtrale) 18 ANS ! C’est une maladie bizarre, ce n’est pas un évènement soudain : tous les jours, une part supplémentaire du malade s’en va, quelque chose que tu ne le verras plus jamais faire. Puis arrive le moment où il ne te reconnaît même plus, etc. À ce moment-là, elle était toujours capable de marcher et formuler des mots mais ne savait plus qui j’étais. Pourtant, elle m’a arrêté dans le couloir, m’a saisi le bras et glissé : « Es-tu à moi ? » C’était si mignon de voir qu’elle savait. Je savais qu’elle ne se rappelait plus mon nom ni qui j’étais mais il restait quelque chose… Le cordon ombilical ? Un instinct maternel.
Oui, quelque chose qui lui a été soufflé intérieurement.
Oui ! Et c’était si mignon… C’est bizarre parce qu’Alzheimer fait des ravages sur tout le système cérébral. Il n’y a plus de notion de temps, plus de pensées. Pourtant cet instinct maternel restait… « Es-tu à moi ? »
Et ce terme « à moi » a un sens vraiment fort. « Tu m’appartiens. »
Oui ! Elle savait que j’étais à elle. J’étais son bébé. Et je lui ai répondu : « Oui maman, je suis à toi. » Le fait qu’au-delà de la perte de toute pensée et raisonnement rationnel, il restait cet instinct, j’ai trouvé ça tellement beau. C’était tellement chouette d’être reconnue même brièvement. C’est beau. J’étais son bébé.
Tu penses déjà à une tournée pour défendre cet album solo ?
Oui, nous allons jouer à Barbican à Londres. C’est chic, (Elle répète avec un air précieux) Barbican ! (Rires) Il y aura des instruments supplémentaires… Nous aurons avec nous des musiciens pour jouer le (Elle rechante le passage de « Summerland » de tout à l’heure). Et des cuivres pour « Coast », ce sera bien.
Je sais que lorsque tu écris un morceau, tu réfléchis à la façon dont le jouer live. Si tu n’emmènes pas le Mucca Pazza avec toi, ceux-ci vont sonner comme des démos !
(Rires) Non, je ne peux pas les emmener avec moi malheureusement. Ça aurait été sympa. À chaque fois que tu veux ajouter un clavier ou autre dans un groupe, pour améliorer l’interprétation d’une chanson, ce n’est pas possible. Là, on ne pourra même pas amener un tambourin. Enfin, il y en aura un, mais intégré à la batterie.
Comme ton répertoire solo est encore maigre, tu vas devoir jouer plusieurs morceaux des Breeders et « Gigantic »…
Peut-être. Tu crois que ce serait de mauvais goût ou au contraire une bonne idée ?
Je pense que le public adorerait. Ou alors il va falloir écrire le double de morceaux pour jouer assez longtemps !
J’ai les morceaux sortis en 45 tours aussi. « Beautiful Moon » est très bon. Mince, il y en d’autres quand même…
« Je ne compose pas pour mes fans. Uniquement pour moi. Je me dis que si j’aime une chanson, quelqu’un d’autre l’aimera forcément. »

Les membres des Breeders t’accompagneront ?
Britt Walford (NdR : batteur de 1989 à 1992) et Jim (NdR : Macpherson, le batteur actuel) ont joué sur le disque, mais ils ne participeront pas à la tournée. Lindsay Glover (NdR : batteur de Future Pigeon et The Burning Softies) si par contre, il a joué sur « Are You Mine » et « Coast ». Et Mando Lopez aussi, qui a fait partie des Breeders.
« Disobedience » pourrait très bien être une chanson des Breeders. Y as-tu pensé ?
Oui, tout à fait. Je savais au moment où je composais « Disobedience » que Jim sonnerait super bien dessus. Même chose pour « Good Time Pushed ». Kelly (NdR : Deal, sa sœur et guitariste des Breeders) participe aussi beaucoup à l’album, sur « Crystal Breath », et elle joue de la basse et de la guitare par-ci par-là. On a d’ailleurs joué « Disobedience » lors d’un concert des Breeders ! Elle sonnait bien !
Ils n’ont pas été jaloux que tu la gardes pour toi ?
(Rires) Je crois que j’ai eu droit à un regard en biais : « Oh super… » Je savais que ça aurait pu être une chanson des Breeders, mais j’avais besoin de morceaux, mec !
Qu’est-il prévu prochainement avec les Breeders ? Il est peut-être un peu tôt pour parler d’un nouvel album, non ?
Ce serait bien. J’ai une idée pour une chanson de Noël. Je sais que ça craint, mais je jure qu’elle sera bien !
Ah, on attend ça !
Ne le dis pas à Josephine ! (NdR : Wiggs, bassiste) (Rires)
Tu le sais, beaucoup te considèrent comme hyper cool, LA plus cool même. Tu connais la chanson… (NdR : « Cool As Kim Deal » de The Dandy Warhols) N’est-il pas un peu gonflant par moments de devoir toujours être cool ? Ca peut devenir un fardeau, non ?
Non. Tu sais, parfois, je pense d’une personne qu’elle est cool puis la minute d’après « mouais… ». Je suppose donc que je dois faire le même effet à d’autres.
Penses-tu parfois que tu aurais pu être plus qu’une « artiste cool » ? Obtenir plus de succès, de reconnaissance… Ou ton statut te convient-il parfaitement ?
Il n’y a rien de mal à être un artiste à gros succès, absolument rien. Beaucoup s’efforcent d’y parvenir. Certains réussissent, d’autres non. Pour devenir un artiste à gros succès, il existe certaines méthodes incontournables : composer de gros refrains, un pont de huit mesures, parler d’un thème universel… Bon, peut-être moins de nos jours, je ne sais pas, mais c’est généralement le cas. Il faut en tout cas que le résultat soit joli. Tu n’obtiens pas un hit universel avec un morceau dont une piste a disparu mais dont tu te dis qu’il est cool parce qu’on entend son fantôme sur une autre piste ! Ce n’est en aucun cas la bonne attitude à adopter pour devenir un artiste à gros succès ! Je ne me dis jamais que j’aurais aimé être une superstar. Dans ces cas-là, tu es obligé de faire (Elle crie) : « AUSTIIIN ! PARIS ! COMMENT ÇA VA, PARIS ? »
(Rires)
Je ne pourrais pas ! Jamais ! Rien que l’idée me fait froid dans le dos. Cela dit, j’ai un grand et beau pont de huit mesures sur mon album…
C’est un début… (Rires) « Cannonball » n’était donc qu’un accident…
Oh mon Dieu, ouais ! Ce morceau est parti d’un feedback grinçant provenant d’un microphone que j’avais emprunté à mon frère. Je l’ai branché sur un ampli Marshall et j’ai entendu (Elle fait le bruitage de l’intro). C’est totalement vrai ! Au départ, ce morceau n’avait vraiment pas pris la voie qui mène habituellement au succès. Mais les gens aiment beaucoup cette chanson. Moi aussi.
As-tu écouté les nouveaux albums des Pixies ?
Je ne les écoute pas de moi-même mais s’ils passent là où je suis, je tends l’oreille. Je suis sûr qu’ils sont bons. Ce sont de bons musiciens, des professionnels qui travaillent dur. Je suis donc sûr qu’ils font de la bonne musique.
Tu sais certainement qu’ils ont encore changé de bassiste ? C’est Emma Richardson maintenant.
Oui, oui. C’est cool.
Ils sortent des albums très régulièrement, sont très productifs. Tu l’es moins. Est-ce parce que tu es très exigeante envers toi-même et que tu ne veux pas décevoir tes fans ?
Je ne compose pas pour mes fans. Uniquement pour moi. Je me dis que si j’aime une chanson, quelqu’un d’autre l’aimera forcément. Je ne peux de toute façon pas savoir ce qu’aime chacun de mes fans. Toi, tu dois aimer certains morceaux que j’ai composés, mais tu as peut-être très mauvais goût ! (Rires) Tu pourrais très bien souhaiter que je compose des chansons dont j’aurais horreur, eh bien je ne le ferai pas !
Dernière question rapidement… As-tu été surprise de la victoire de Trump ? Et n’es-tu pas parfois désespérée en pensant que la moitié de ton public a voté pour ce type ?
Si tu m’avais demandé cet été quand les démocrates ont présenté Kamala à la place de Biden, je t’aurais répondu qu’elle n’avait aucune chance de gagner. Aucune chance. On en avait parlé avec Kelley : les gens ne vont pas voter pour une femme, impossible ! Mais ensuite, une énergie m’a semblé la porter et j’ai donc finalement été déçue qu’elle ne gagne pas alors que je n’y croyais pas du tout à la base… Entretemps, je m’étais dit qu’il y avait peut-être une chance. Mais ce n’est pas comme si plus de la moitié de la population avait voté pour Trump, « seulement » plus de la moitié des votants. Il a effectivement gagné le vote populaire, mais pas avec une avance énorme. Les gens ont voté, c’est lui notre président… Mais ça va aller. Enfin, je n’en sais rien… J’imagine que vous vous êtes dit : « Bordel de merde ! »
Oui, un peu… Mais ce n’est pas beaucoup mieux chez nous et dans beaucoup d’endroits dans le monde.
Je sais.
Mais ça ira. On a ta musique !
Ouiii. Merci !
Interview réalisée par Jonathan Lopez, publiée initialement dans new Noise #73 janvier-février 2025
Merci à Jean-Philippe Aline