Areis – The Calling

Puiser dans l’Occitan ancien n’est pas une mince affaire, si tant est qu’une part du passé soit transmutée dans l’avenir, justement AREIS ne s’enferme pas dans un folklore exigu et ne se laisse pas mener par le vent. Le groupe a creusé en profondeur jusqu’à exhumer des légendes obscures, puis s’est élevé afin de visionner la cartographie de tout un pan de l’histoire universelle, retranscrite dans une musique indéfinissable, explorant les strates du langage. « The Calling » répond au besoin impétueux du quatuor de recontextualiser une gnose transmise par la filiation d’évènements historiques, légendaires. Les mots les plus usuels peuvent contenir des significations cachées au profane, le spectre d’un cheminement qui s’accorde avec une thématique précise, celle de la condition humaine.
Areis jouit d’une crédibilité considérable en réussissant à arpenter plusieurs territoires, en réunissant des motifs hardcore à des blasts apparentés au black metal, alternant avec des passages mélodieux. Le groupe trouve du réconfort dans les vestiges, « Rise From the Ruins » confirme sa faculté à renaître des cendres, se reconstruire à partir de scories, tout en préservant la flamme lustrale de lieux emblématiques où les âmes ne se sont jamais éteintes. La production est monumentale, chaque instrument est audible, on est loin d’un salmigondis bruitiste, bien que chaque titre ait une amorce qui grimpe rapido dans le rouge des vumètres, le groupe sait emprunter d’autres sentiers, comme ce « Lavender Turned into Ashes » avec ses harmonies vocales Grégoriennes, au loin le cri plaintif résonne.
« We Are » est colossal par ses riffs appuyés, la rythmique massive renforce l’idée que le quatuor sait ralentir le tempo, pour mieux l’entrecouper de rythmes furibonds. Une colère métaphysique qui ne cesse de se renouveler, on ne perd pas une once de cette violence supersonique. Justement, « How Far » avec ses passages presque prog, est enrichi de chœurs avant que le final explose dans tous les sens pour culminer avec la langue occitane. Mention spéciale pour « Primordio Solis » qui, de toute sa fougue, révèle le rayonnement solaire ancestral, la naissance de l’astre qui vient brûler et purifier « d’ocre et de sang » la surface de toutes choses.
Il va falloir surveiller de près Areis qui, après un premier album sans titre, revient ici avec une maturité musicale philosophique, non pas pour amuser la galerie, mais pour propager son feu, son inépuisable énergie qui ravira les fans des citadelles sans nom. Et nul besoin de comparer Areis avec une scène ou un groupe actuel. Sa personnalité transparaît à chaque recoin.
Franck Irle