An Eagle in your Mind – Intersection

Publié par le 25 avril 2023 dans Chroniques, Toutes les chroniques

(Green Piste, 31 mars 2023)

La conformité englobe une part non négligeable de l’industrie musicale, de nombreux artistes sont tombés dans le piège de l’orthodoxie. An Eagle in your Mind échappe à cette destinée implacable, avec Intersection, le duo nous délivre de la résignation rongée par les habitudes.

De leurs voyages, à la croisée des méridiens, Sophia Achhibat  (chant, harmonium indien) et Raoul Canivet (guitare, percussions, synthés) ont modelé le creuset de leur musique incantatoire, explorant plusieurs territoires à bord de leur camion où ont été enregistrés les 7 titres de ce nouvel album. Une topographie des cultures orientales et occidentales, une symbiose dont l’harmonium mêlé aux guitares, dresse des volutes subtiles, une nomenclature où les barrières terrestres se dissolvent transportant l’âme vers d’autres rivages, d’autres visages. « Desert Land » prend forme, ouvrant les portes de la nuit, cette alchimie fait naître des cavités irriguant des constellations qui se dessinent à chaque pas. C’est un voyage dans l’extase folkienne qu’il convient d’appeler à juste titre comme une musique initiatrice.

« Storm » s’ancre plus profondément dans un blues hanté qui vous accompagne partout. Cette puissance évocatrice d’une mystique se renforce dans le texte (« And I stay in the deep of the night and I stay with so strange people at night »), le chant de Sophia fait figure de supplications.

La moiteur se répand et envahit chaque interstice, l’usure et la rouille fissurent les derniers vestiges abandonnés par l’humanité. Et c’est dans ce no man’s land que le duo s’est aventuré, associant ses sonorités aux lieux, aux objets. An Eagle in your Mind a trouvé une porte de sortie, la clé des champs.

Quelle est donc cette fièvre qui s’est emparée du duo ? Par quel lubrifiant magique les instruments glissent les uns sur les autres ? C’est peut-être la quête d’un sens anthropologique embrassant le monde qui est exprimé dans ce disque. Une hybridation qui ne se conçoit pas comme celle d’un phalanstère, mais comme l’aventure de l’âme, portée par l’inconnu. Une chevauchée incarnée par « Let Me Ride », titre potentiellement plus pop et accrocheur, avant que le magistral « Silver Plate » vienne sceller Intersection dans un tourbillon de bourdons. Forcément, après une première écoute, on y revient sans jamais avoir la sensation d’une quelconque récurrence.

Franck Irle

On ne remerciera jamais assez Virginie Bellavoir de faire la promotion d’artistes inclassables !

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