Jessica93 – 666 tours de périph’

Posted by on 9 octobre 2025 in Chroniques, Toutes les chroniques

(Born Bad, 10 octobre 2025)

Huit ans qu’on l’attendait : voici enfin le retour du Roi. Si vous souhaitez en savoir plus sur les épisodes précédents, je vous invite à lire l’excellent papier du boss dans le dernier numéro d’Exit.

Pour ceux qui suivent le gars depuis ses débuts, un nouvel album de Jessica93 équivaut à être traîné par le col jusqu’au bord du précipice sans autre choix que de se laisser happer par le tourbillon des guitares malades et par le charme des basses sépulcrales, qui sont sa signature, rendus dociles et  hagards par les boucles neurasthéniques, qui sont son empreinte.

Avec le gars, rien n’est jamais léger ni évident et 666 Tours de Periph‘ n’échappe pas à la règle. Enregistré sous l’impulsion d’Arthur Satan et sorti par Born Bad, il est peut être ce qu’il a fait de plus solide et de plus réussi à ce jour. Faire durer le suspense est donc inutile, 666 Tours de Periph‘ est un coup de maître balancé dans les ratiches du monde par un Jessica93 à nouveau seul et revigoré, qui confirme en huit titres secs qu’il n’a rien perdu de sa force de frappe ni de se propension à nous remuer les tripes, qu’on le veuille ou non. 

Ainsi, sur « Florence Rey », il déterre un fait divers macabre afin de mieux régler ses comptes avec des gens peu fréquentables. Le beat est addictif, les paroles sont crues, aucun atermoiement n’est à déplorer, la musique nous plonge la tête sous l’eau d’entrée de jeu. Si la formule sera largement dupliquée au cours de l’album, jamais elle ne sera redondante. Un des talents de Geoff les plus notables est de toujours trouver un angle d’attaque et une dynamique légèrement de biais qui parvient immanquablement à éviter de nous abrutir tout en nous plombant ostensiblement la tronche. 

666 Tours de Periph’ est une collection de tubes imparables parmi lesquels se trouve la d’ores et déjà incontournable « Colline du crack » : une chanson d’amour contrarié dont le refrain n’est pas sans rappeler Radiohead (cf l’excellente interview parue dans le new Noise #76), l’une des grandes influences de Geoffroy (NdR : si jamais mon corps est retrouvé flottant dans un caniveau de la rue Saint-Maur, vous saurez vers qui vous tourner pour trouver le coupable). « Le Grand Remplacement » et son riff grunge/doom, « Brûlure Indienne » et ses assonances infernales… autant de perles enfilées à la suite qui finissent par dresser le canevas d’une vie passée sous l’ombre du périph’, au bord du bord. Le spleen, la came, la frustration, et l’avenir qui s’éloigne un peu plus chaque jour. Jessica93 donne à sentir le vide tout en donnant à sentir ce que l’opiniâtreté peut accomplir. C’est aussi ça qu’évoquent pour nous les boucles hypnotiques qu’il use encore et encore. De Jessica93 à la Pléiade, il n’y a presque rien, et vingt fois sur le métier remettez blablabla… avec un peu de bol (quoique) on finira purifié, c’est lui qui le dit sur le dernier morceau du disque.

Avec 666 Tours de Periph’ le chemin de croix de Jessica93 se poursuit brillamment dans les méandres de ce monde en ruine. Suffisamment brillamment, en tout cas, pour apporter ne serait-ce qu’un éclat pâle, au milieu de toute cette merde. On ne l’attendait plus et maintenant qu’il est là, on ne peut plus s’en passer. Un coup de maître on vous dit, qui place définitivement le gars au sommet de la pyramide hexagonale (oui, bon, allez vous faire foutre). 

Max

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