Nirvana – In Utero

Publié par le 30 septembre 2018 dans Chroniques, Incontournables, Non classé, Toutes les chroniques

(DGC, 21 septembre 1993)

Vu que vous allez trouver des dizaines voire des centaines de sites pour vous raconter l’histoire de ce disque, la vie de Cobain et de Nirvana, je vais jouer à fond le mauvais critique, celui qui ne parle que de lui-même. Du coup, si vous cherchez un article historique ou que vous avez un avis très arrêté sur ce que doit être la critique musicale, vous pouvez d’emblée passer votre chemin.

Au commencement, ce disque n’était rien qu’une image. Une femme avec des ailes d’ange sur un fond orangé. Une femme tellement nue qu’on voit l’intérieur de son  corps. Et un nom qui sonne familier et mystique, Nirvana. À l’époque où j’ai vu cette image, je devais déjà avoir entendu parler du groupe sans jamais l’avoir écouté, je savais que c’était de la musique mais pas du rock, pas du grunge, ces mots n’avaient que peu de sens pour moi, même pas qu’elle était faite par des hommes, je m’étais même imaginé que c’était une femme qui devait chanter ça, allez savoir pourquoi. Je n’avais donc aucune idée de qui était Kurt Cobain et j’ignorais complètement que dans à peine 6 mois, il serait l’objet de la plus grosse tragédie musicale des années 90.

En revanche, je me souviens parfaitement du jour où j’ai écouté ce disque, en même temps que son ainé Nevermind. La grosse claque dans la gueule pour un gamin élevé dans une maison où la plupart des disques avaient sur leur pochette un quelconque hippie barbu orné d’une guitare classique et d’un pull dégueulasse. Le truc le plus rock que j’avais dû entendre jusque-là, c’était Jean Jacques Goldman. Imaginez le choc !

Mon premier émoi, sans surprise, c’était “Rape Me”. Le tube accrocheur par excellence, et rebelle en plus. On était tous des brêles en anglais, à l’époque, mais on savait étonnamment exactement ce que le titre voulait dire. Ce morceau, évinçant ainsi la bombe “Smells Like Teen Spirit” qui pour ma part fut à retardement, devenait mon premier coup de foudre avec Nirvana. Le deuxième viendra très vite, “Heart-Shaped Box” qui reste encore aujourd’hui un de mes tubes préférés du groupe.

Ensuite, mon histoire avec In Utero fut jalonnée de va et vient, jamais vraiment disparu mais parfois en retrait avant d’y revenir inexorablement. Au collège, alors que je découvrais Oasis et tombais dans le piège de la britpop pour quelques années, chaque réécoute de Nirvana faisait vaciller mes sens d’une façon différente. In Utero,  souvent. Après le lycée, alors que j’errai sans gloire dans des sphères métalliques, il fallut l’influence bienvenue de ma petite amie d’alors pour me remettre dans le droit chemin. In Utero, toujours In Utero.
Aujourd’hui que le gros de ma culture musicale est basée sur la pierre angulaire Nirvana, et que j’ai décortiqué leur discographie en long en large et en travers, j’en tire 2 conclusions. Premièrement, ce disque n’a rien à envier à Nevermind, que ce soit en terme de son ou de composition. Ceux qui accusent Cobain d’avoir été en panne d’inspiration après leur méga succès ont dû se mettre le doigt dans l’oreille jusqu’au cul. Je me rend compte en écrivant ces lignes que, même à l’époque naïve ou “Smells Like Teen Spirit” était mon morceau préféré du groupe, je n’ai jamais préféré Nevermind à In Utero.

Deuxièmement, ce disque est parfait à mes yeux. Entre une ouverture “Serve The Servants”/”Scentless Apprentice” qui résume à elle seule le paradoxe de Nirvana (un titre plutôt poppy super personnel et désabusé suivi d’une déflagration sonore énervée sur un livre écrit par un autre), des morceaux ultra entendus mais dont les mélodies sont irrésistibles (“Dumb”, “All Apologies”) et le triptyque inégalable “Milk It”-“Pennyroyal Tea”-“Radio Friendly Unit Shifter”, In Utero atteint cet équilibre parfait entre mélodies de haute volée, rage punk, désabusion et humour, le tout servi par la production brute de Steve Albini qui ne réussit pas à gommer la fibre pop de Cobain. Une somme d’éléments qui donnent un tout grandiose.

In Utero est encore aujourd’hui mon album préféré…avec You’re Living All Over Me de Dinosaur Jr, si je dois tout vous dire. Il est un des premiers que j’ai racheté en vinyle, et l’un de ceux que j’ai le plus racheté, d’ailleurs. Pour avoir notamment les faces b qui sont toutes des tueries. J’aime ce disque d’amour. Il est la première image que j’ai eu de Nirvana et sans doute la dernière que j’emporterai. Je pourrais en parler des heures. Ne me lancez même pas…

Blackcondorguy

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