Pain Magazine – Violent God

Posted by on 16 octobre 2025 in Chroniques, Toutes les chroniques

(Humus Records, 3 octobre 2025)

Qui écoute distraitement Pain Magazine pourrait en tirer un portrait assez caricatural et réducteur. Percutant, ce disque l’est assurément. De défouloir, il pourrait parfaitement servir. (Yoda, il suffit) L’alliance entre Birds in Row, Maelstrom & Louisaaah devait forcément accoucher d’un mélange de (post-)hardcore (comme les premiers) et d’électro tabassante/indus (à l’image des seconds). Et ce n’est pas l’entame et le morceau-titre, hurlé par Louisahhh, tout en tension et exaspération, qui viendront contrarier ce constat. En deuxième position, le formidable « Weak and Predatory » en est encore la parfaite illustration. Cette fois, c’est Bart Balboa (de Birds in Row) qui officie au chant et le morceau, totalement irrésistible, incite irrémédiablement à prendre les armes. Percutant, défouloir mais pas que, affirmions-nous à la surprise générale. Oui car derrière cette entame à même de terrasser 16 gouvernements Lecornu et malgré des beats qui cherchent quasi systématiquement la confrontation, les mélodies se fraient régulièrement un chemin, entre deux étincelles (la fin de « Violent God » et sa touche new wave ou « Dead Meat », trépidante mais pas enragée, où l’émotion point sans ambiguïté). 

De ce disque coup de Pain, se dégage une étonnante hétérogénéité, symbolisée notamment par le chant. Par les voix d’abord (au nombre de trois) mais également par leurs façons de s’exprimer. Tour à tour véhémente, urgente mais mélodique, éthérée, incisive et méthodique, haut perchée, torturée mais sensuelle, martelée et impérieuse. Les voix étonnent, donnent le la mais ne font pas tout. On déplorera ainsi ce « Choke Points » dont le propos salutaire (la dénonciation d’une industrie du disque trop rivée sur les chiffres, les tableurs excel, les nombres de streams, le fric…) prend le pas sur l’intérêt musical. Pour le reste, on trouvera inévitablement du cyberpunk à la Prodigy (« Magic ») et, plus surprenant, une compo nimbée de brouillard d’où irradie une pointe de shoegaze avant la tempête (« Like a Storm »), du trip-hop mélancolique (« Horse Song ») ou encore un folk touchant, sur un fil (« A Good Hunter » chanté avec délicatesse par Quentin Sauvé, bassiste de BiR et compositeur folk au demeurant).

Bref, il y a de quoi faire et pas forcément ce qu’on imaginait entendre. C’est là un véritable point fort mais cela rend également ce Violent God assez déroutant. Si vous souhaitiez uniquement vous exciter tout seul dans votre salon, attendez-vous à quelques déconvenues et à reposer parfois votre séant sur le canapé. Mais vous n’êtes pas que des bourrins bas du front, pas vrai ? Cette collaboration qui n’était censée être qu’une tentative éphémère se sera révélée plus prolifique que prévu et constitue une des belles surprises de l’année. Entre gens talentueux, il faut s’attendre à tout. Surtout au meilleur.

Jonathan Lopez

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