Midlake – A Bridge To Far

Midlake, ou l’autre nom pour « groupe de survivants ». Revenons en 2006 avec la sortie de The Trials of Van Occupanther, son magnifique deuxième album d’indie folk, épique, baroque et flamboyante. Le groupe devient très populaire dans le monde indé, tourne énormément, publie un troisième album (le plus « anglais », The Courage of Others), tourne à nouveau ad nauseam et, comme Icare, se rapproche trop près du soleil et chute tragiquement avec le départ de Tim Smith, compositeur et architecte en chef de ce groupe du Texas. Laissant les autres membres du groupe dans un champ de ruines musical, dont on pensait qu’ils n’allaient jamais se relever. Beaucoup n’ont en effet jamais survécu au départ du créateur. Et pourtant, Eric Pulido, le guitariste, reprend la composition et le chant, pour publier Antiphon, avec un son réinventé et remarqué, déjouant tous les pronostics et tuant définitivement le père. Dans beaucoup d’interviews, le groupe a l’air surpris de toujours exister, travaillant plus à l’envie qu’au plan de carrière. La proximité avec un autre groupe de faux slackers, Foxwarren, est palpable, dans la musique et l’attitude.
Nous voilà donc en 2025 avec A Bridge To Far (quel jeu de mots…), après trois ans de silence. L’ouverture est tout en mollesse sur « Days Gone », qui sent bon le hippie sale échoué sur un trottoir d’Ashbury Street, flûte traversière comprise comme sur un morceau de The Mamas and the Papas. On reste dans la même humeur dans « Bridge To Far », aux chœurs trempés dans le poncho sale et les cheveux gras, et peu subtils. « The Ghouls », le single, tente une remontée, mais peine à convaincre avec une structure 60’s/70’s très évidente et un refrain qui ressemble à des chutes de studio de Supergrass. Où est le baroque, où est la fragilité travaillée du Midlake période Antiphon ? Pour la (re)trouver, il faut passer « Guardians », un honnête duo avec Madison Cunningham (représentante de la dernière génération folk plus ou moins indé) et « Make Haste », qui tente des arrangements et fait penser à Foxwarren sans être au niveau. On arrive péniblement à « Eyes Full of Animals » pour retomber sur le Midlake canal historique, tout en longueur, langueur et atmosphère de musique de film. « The Calling » rassure également, subtil, planant avec son refrain en montée. Même légèreté, même moment épique et inspiré sur « The Lions Den ». Mais la série de raffinement pop prend fin avec le final « The Valley of Broken Thorns », et son piano qui penche, trop, vers la berceuse mièvre, et nous laisse avec cette impression flottante d’inachevé. Le communiqué de presse nous dit que « la référence et l’inspiration de A Bridge To Far, c’est Midlake ». Il serait plus juste de dire que Midlake se transforme de plus en plus en un projet solo d’Eric Pulido, le chanteur/guitariste, mais malheureusement de moins en moins flamboyant.
Maxime Guimberteau