L7 @ La Cigale (Paris), 13/06/18

Publié par le 19 juin 2018 dans Live reports

C’est dur de vieillir. Quand on se rend compte qu’on loupe les premières parties non pas parce qu’on est resté avec ses potes boire des bières, comme certains sont coutumiers du fait, mais pour de sombres histoires de boulot ou de bain à donner, on doit se rendre à l’évidence. Quand on doit se faire violence pour sortir le mercredi soir, alors que c’est L7 qu’on va voir, aussi.

Je ne peux donc malheureusement pas vous parler de Black Moth qui ouvrait ce soir, arrivé juste après leur prestation, mais je peux vous expliquer pourquoi je ne regrette absolument pas d’avoir fait le déplacement malgré le poids des années.

Car même si le temps d’installation aura été un peu long, même si le concert aura commencé avec une musique hip-hop dancefloor assez improbable dans le contexte, quand les L7 commencent à jouer, il y a de quoi mettre tout le monde d’accord. Déjà, elles commencent très fort : “Andres”, “Fast And Frightening” et “Everglade”, sans vraiment laisser le temps de souffler. À peine trois morceaux et que du matériel à rappel ! Alors que Suzy Gardner entame son tour de chant, Donita Sparks et Jennifer Finch mettent déjà l’ambiance en bougeant partout avec leurs instruments. Dee Plakas, elle, est devenue blonde et barbue, mais tape toujours avec entrain sur ses fûts. Trois bonnes claques d’entrée de jeu, où chacune chante tour à tour, et déjà le public qui s’est amassé à la Cigale est conquis : ça danse, ça chante, ça saute partout.

Après nous avoir mis dans le bain, Donita nous fait un petit topo. 12 heures avant leur départ pour l’Europe, Dee Plakas s’est cassée le bras. Elle est donc remplacée par un certain Joey, ce qui explique son changement d’apparence manifeste. Pour couronner le tout, elles ont perdu leur bannière et on dû faire avec les moyens du bord, en l’occurrence du scotch vert fluo pour décorer la scène d’un gigantesque L7. “On déchire ou pas ?” nous demande-t-elle avant que Jennifer ne réponde “on a tellement de clito qu’on n’a pas besoin de couilles” en référence à un vers de “Fast And Frightening”. Puis elles enchaînent les vieux titres, les blagues, les moments forts. Oui, elles déchirent, c’est sûr !

Si la formule du groupe selon Donita elle-même, c’est le mélange d’hymnes de colère et d’humour, on a été bien servis ce soir. Niveau humour, on a eu par exemple cet échange après une bière, où elle nous explique que Suzy est plutôt à l’eau, qu’elle a besoin de bière et que Jennifer tourne à l’héroïne. “Oui, donnez-moi de l’héroïne. Quoique, vu la mode, je devrais plutôt me mettre aux meths“. Et Suzy de renchérir “quelqu’un a du plutonium ?” avant que le groupe ne lance “Crackpot Baby”.

Pour la colère, on a eu une setlist assez parfaite, où l’on pouvait s’interroger sur la présence en milieu de set de titres comme “Fuel My Fire”, “Off The Wagon” ou “Shove”, avant de se dire qu’il restait encore pas mal de prétendants au rappel explosif. Une bonne manière de se rendre compte que le concert a des allures de best of, et que le groupe a quand même sorti un bon nombre de tueries. Seul bémol, un mec bourré qui s’effondre comme une masse à deux pas de moi, et qui finira sous la responsabilité des pompiers. Au moment où “Shove” commence, le pauvre a loupé et gâché en partie à ceux qui étaient près de lui un des meilleurs morceaux du concert.

À part ça, ce concert a permis de vérifier deux choses que nous avaient dit Donita Sparks en interview : d’une part, “I Came Back To Bitch” et “Dispatch From Mar-A-Lago” ont toutes les deux leur place dans la discographie de L7 et s’incluent parfaitement dans la prestation. D’autre part, l’entente semble être parfaite dans le groupe, et même si le style plus réservé de Suzy Gardner contraste avec l’exubérance des deux autres, la cohésion entre elles et le plaisir de jouer sont visibles. Dee Plakas est également de la partie, venant nous montrer son bras dans le plâtre, restant sur la scène pendant une bonne partie du show et n’oubliant pas de nous dire au revoir avant que les lumières ne se rallument pour de bon. Difficile d’imaginer ça dans un groupe qui ne fait ça que pour le fric. Joey, quant à lui, sera plus studieux, semblant un peu mal à l’aise, même s’il s’en sortira honorablement pour son deuxième concert au sein de la formation.

Enfin, pas de bon concert sans bon rappel. Si le fait de finir le set principal par un nouveau titre peut étonner sur le papier, la fin de “Dispatch From Mar-A-Lago” où Donita se jette à plusieurs reprises dans le public avec sa guitare est un moyen assez parfait de garder une ambiance chaud bouillante avant que le groupe ne revienne quelques minutes plus tard pour nous achever définitivement. Après nous avoir encouragé à rendre hommage à la première partie, ce que je ferai par principe sans savoir malheureusement si c’était mérité, Jennifer Finch nous donne les paroles du refrain avant d’entamer une reprise de “Bloodstains” d’Agent Orange. Puis retentissent les premières notes de “Pretend We’re Dead”, peut-être leur titre le plus connu. Et même si toutes les bonnes choses ont une fin, c’était un énorme plaisir que cette fin soit “Shitlist”, là encore reprise collectivement en chœur. Gros morceau, grosse ambiance, la meilleure manière de terminer la soirée en nous donnant envie de les revoir au plus vite. C’était la première fois que je voyais L7, j’ai eu de bonnes raisons de les rater chaque fois qu’elles sont passées par la France précédemment. Ce soir, j’ai découvert que ces raisons n’étaient peut-être pas si bonnes que ça en comparaison de ce que j’ai raté.

C’est dur de vieillir, c’est certain. Sauf pour ces filles-là ! On dirait que le temps n’a pas d’emprise sur elles, elles pourraient tout aussi bien avoir encore 20 ans, vu l’énergie qu’elles dégagent. Elles pourraient tout aussi bien être un tout jeune groupe qui fait la tournée des petits clubs vu l’aspect chaleureux du concert, et cette impression qui se dégage que l’ensemble de la salle, groupe et public compris, n’était qu’un groupe de potes (même toi, mec bourré qui m’a gâché le début de “Shove”, j’espère que tu t’es bien remis et que ça ne t’a pas complètement gâché le concert). Pire, elles nous donnent une cure de jouvence quand on voit sur scène ces morceaux dont certains ont presque 30 ans, qu’on a écouté des milliers de fois, et qui restent plus rentre dedans et efficaces que pas mal de nouveautés. On se sent jeune, on se sent bien, on en oublierait presque qu’on va devoir reprendre sa vie de vieux et aller au boulot demain. Merci !

Blackcondorguy

Un grand merci à Florence pour les photos.

Setlist : Andres – Fast And Frightening – Everglade – Monster – Scrap – Fuel My Fire – One More Thing – Off The Wagon – Slide – Crackpot Baby – Must Have More – Drama – I Came Back To Bitch – Shove – Deathwish – Dispatch From Mar-a-Lago.

Rappel : Bloodstains (Agent Orange) – Pretend We’re Dead – Shitlist.

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