Bärlin – The Dust of our Dreams

Publié par le 21 mars 2020 dans Chroniques, Toutes les chroniques

(Lilian Prod / L’Autre Distribution, 27 mars 2020)

Parfois, vu toutes les sorties qui s’amoncellent à certaines périodes de l’année, un tri s’opère instinctivement entre les écoutes prioritaires et celles qu’on met de côté pour plus tard. Soyons honnêtes, le nouvel album de Bärlin avait de bonnes chances de se retrouver dans cette dernière catégorie. Mais la singularité de ce groupe demeure un fort pouvoir d’attraction et dès le premier single dévoilé, on était invités à s’y replonger sans calcul. Dans ce métier, la curiosité est un bien joli défaut et un groupe capable de nous emmener là où on ne l’attend pas peut très vite supplanter celui qui récite ses gammes gentiment.

Confirmation immédiate avec ce début d’album en forme d’enchantement (“Pagan Rituals”). Très longue intro qui sent la classe à 15 bornes, clarinette subtile avant l’arrivée d’une basse imposante. Décollage immédiat et frissons à tous les étages pour les plus sensibles. Le chant est remarquablement posé, distillé avec parcimonie, et le timbre toujours aussi singulier. Dans le dernier tiers de cette pièce magistrale de plus de 10 minutes, la basse ne se contente plus d’accompagner, elle écrase tout dans un final qu’on doit bien se résoudre à qualifier de heavy.

Pour le reste, on oscille davantage entre rock feutré et ténébreux (qui serait probablement adoubé par sir Nick Cave himself) et jazz élégant (non sans réfréner quelques pensées furtives envers Morphine). C’est aussi lent que captivant (“The Dust Of Our Dreams”, sublime) et il est toujours aussi réjouissant de s’immerger dans un univers d’une telle richesse façonné par trois hommes seulement, sans guitare aucune mais avec une patte certaine (si un jour on m’avait dit que je conterais monts et merveilles d’un groupe constitué d’un chanteur/clarinettiste, un bassiste et un batteur…).

Plus loin, c’est “Black Heart” qui nous fend le cœur en deux. Porté par la voix chevrotante et pourtant pleine d’assurance de Clément Barbier, le titre se mue ensuite en instrumental, et prend une toute autre dimension.

Voilà pour les moments de grâce indéniables mais la force de ce disque demeure sa grande cohésion d’ensemble, sa capacité à vous transporter dans une bulle hors du temps, de la folie humaine et de la peur du Coronavirus. Assurément dépaysant, peut-être aride pour les fermés d’esprit (pauvres d’eux), The Dust Of Our Dreams mérite largement qu’on s’y attarde et qu’on lui accorde le temps nécessaire pour dévoiler tous ses charmes. Maintenant que vous êtes prévenus, ce serait dommage de rester au pied du mur.

Jonathan Lopez

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